Les Canadiens s’endettent de plus en plus pour l’achat d’une maison, l’acquisition des biens et services et le financement des formations. À la fin de 2017, la dette des ménages canadiens s’élevait à peu plus de 2000 milliards de dollars, dont près des trois quarts représentaient les prêts hypothécaires (Banque du Canada).
La dette moyenne des ménages canadiens à la même période était de 162 400 $ (Statistique Canada). Un fardeau colossal qui alimente les préoccupations de plusieurs acteurs (gouvernement, Banque Centrale, institutions financières…). Comment la dette des Canadiens a-t-elle pris cette ampleur et quelle est son impact sur l’économie du pays ?
La dynamique d’endettement des Canadiens
La dette des ménages canadiens poursuit son rythme de croissance soutenu depuis une trentaine d’années. En effet, plusieurs facteurs expliquent cette dynamique d’endettement. Comme dans tous les pays développés, le marché hypothécaire est florissant au Canada et l’accès à la propriété est une culture permettant de constituer un patrimoine, fruit d’un dur labeur. Dans le même sens, les taux bas d’inflation et d’intérêt depuis les années 1990 (politique monétaire de la Banque Centrale et crise financière mondiale de 2008) ont stimulé les prêts hypothécaires. Cette demande a exercé une pression sur le marché immobilier pour faire grimper les prix de logements, dont l’offre est peu extensible en raison de plusieurs contraintes (réglementaires, géographiques et environnementales). Par ailleurs, le gel des salaires, la baisse du revenu disponible des Canadiens ont contraint ces derniers à recourir au crédit à la consommation, dont l’accès est rendu facile avec une large panoplie d’offre (marge de crédit, carte de crédit, protection de découvert, prêt étudiant, prêt d’un concessionnaire automobile, etc.), pour acheter des biens et services. La dette à la consommation des Canadiens a atteint 620,7 milliards de dollars au troisième trimestre de 2017 (Statistique Canada).
L’impact de la dette des Canadiens sur l’économie
En théorie, la dette fait tourner l’économie, notamment à court terme, via l’investissement et la consommation des biens et services, mais un fardeau démesuré de dette peut entrainer une crise. Le risque de l’endettement d’une population donnée est mesuré par le taux d’endettement par rapport au revenu disponible. La dette des ménages canadiens représente près de 170 % de leur revenu disponible, c’est-à-dire, pour chaque dollar de revenu annuel net d’impôt, les Canadiens doivent 1,70 dollars. Ce ratio a presque doublé depuis 1990 où il était de 87% du revenu disponible (Banque du Canada). En effet, ce ratio s’avère alarmant et renseigne sur la détérioration de la situation financière des ménages, mais il est à nuancer, car ce dernier est calculé comme si toutes les dettes contractées devaient-être remboursées avec le revenu disponible d’une seule année. En plus, la situation de l’emploi au pays (taux de chômage bas) assure aux ménages des revenus stables.
Par ailleurs, la Banque du Canada qui porte son taux directeur à 1,5% (la quatrième augmentation depuis l’été 2017) a rendu plus onéreux certains prêts (hypothécaires et marges de crédit) qui dépendent du taux préférentiel, lui-même, lié au taux directeur. Cette nouvelle donne entrainera l’augmentation du poids de la dette des ménages dont les plus endettés seraient contraints de réduire leurs dépenses pour rembourser leurs emprunts, ce qui freinera la consommation, corollairement, la croissance. Mais cette mesure modèrera la croissance de la dette des ménages en dissuadant certains de contracter des prêts. Les dettes de consommation, notamment des cartes de crédit ayant un coût plus élevé (un taux usurier avoisinant 20%) peuvent présenter un grand risque. Elles peuvent se transformer en dettes toxiques lorsque l’emprunteur ne parvient pas à honorer ses engagements.
Sofiane Idir