La financiarisation de l’économie s’étend maintenant au secteur environnemental avec une efficacité incertaine. C’est un des constats de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) qui explique que le poids de l’économie financière a poursuivi sa croissance dans les dernières décennies.
Qu’est-ce que la financiarisation de l’économie ?
Le concept désigne la position dominante des acteurs de la finance et les changements socioéconomiques que le poids accru de ce secteur a entraînés. La financiarisation se manifeste à travers une variété de phénomènes qui touchent le secteur financier, les entreprises, les individus ainsi que les États. Elle a accru la vulnérabilité de l’économie en contribuant notamment à l’endettement des ménages.
Financiarisation de la nature
La pénétration des logiques financières dans différentes sphères de l’économie et de la société s’est révélée jusqu’ici être un facteur de concentration de la richesse et d’instabilité économique. Or, depuis une dizaine d’années, on observe l’émergence de la finance dans le domaine de la protection de la nature. « La financiarisation de la nature contribue-t-elle vraiment à la lutte aux changements climatiques », questionne Billal Tabaichount, co-auteur de l’étude et chercheur associé à l’IRIS.
Efficacité incertaine
L’IRIS constate notamment que la finance climat a pris de l’ampleur dans les dernières années. Le Québec, qui a lancé un programme d’obligations vertes en 2017, est le quatrième plus grand émetteur de ce type d’obligations au Canada. Ici comme ailleurs, les fonds s’avèrent toutefois inégalement répartis. Présentement, cette tendance profite aux projets en transport et en énergie, mais laisse de côté d’autres secteurs, comme l’agriculture, où une transition est nécessaire. « Avec des mesures volontaristes, on est loin d’atteindre les objectifs en matière de transition écologique juste. C’est d’autant plus préoccupant que l’efficacité de cette approche est pour le moins incertaine », déplore M. Tabaichount.
La financiarisation perpétue et augmente les inégalités
« La logique financière dans les différentes sphères de l’économie fragilise les économies au détriment des travailleurs et travailleuses, et des ménages, tout en favorisant la concentration de la richesse », indique la chercheuse à l’IRIS. En effet, la financiarisation a notamment eu pour effet d’augmenter l’endettement des ménages tout en faisant stagner les salaires. De leur côté, les mieux nantis comptent sur d’autres formes de rémunération qui ont contribué à l’augmentation de leurs revenus.
Au Canada, entre 1982 et 2017, le revenu après impôt moyen du 1 % le plus riche a augmenté de 113 % (198 584 $ à 295 401 $), tandis que pour les 99 % restants, il est passé de 28 294 $ à 39 616 $, pour une hausse de seulement 40 %.
Le poids croissant de la finance, dont les impacts négatifs se font ressentir dans plusieurs domaines, est la conséquence d’une dérégulation du secteur. « La clé pour rendre la finance utile d’un point de vue social et environnemental réside, comme pour les autres secteurs de l’économie d’ailleurs, dans l’encadrement réglementaire et la planification démocratique », conclut madame Posca, chercheuse à l’IRIS
Source : IRIS – Institut de recherche et d’informations socioéconomiques