Dénicher un appartement à l’approche du 1er juillet (date traditionnelle du déménagement au Québec) à Montréal ou dans une autre ville de la province est devenu un parcours de combattant qui risque de déchanter tout candidat en quête d’un logis.
En effet, les faits saillants du rapport de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) de janvier 2023 montrent tous les signes d’une crise qui frappe de plein fouet le marché de logements locatifs non seulement au Québec, mais dans tout le Canada : l’explosion de la demande locative, la baisse historique du taux d’inoccupation des appartements locatifs et l’augmentation vertigineuse des loyers.
Ces signaux de la SCHL ne laissent aucun doute sur l’existence d’une crise du logement au Québec. Quels sont les facteurs qui ont engendré cette crise ? Cette crise est-elle structurelle ou conjoncturelle ? Et quelle est son ampleur ?
La défaillance du marché de logements locatifs au Québec : une galère hors de contrôle et risque de couler !
A l’approche du 1erjuillet, les choses se corsent pour les locataires qui sont en quête d’un toit, car, partout dans la province, non seulement les loyers explosent, mais les logements disponibles se font rares. Pour dénicher un logement, il faut s’armer de patience, voire beaucoup de patience, car votre recherche peut durer plusieurs mois et rester vaine! Le pourquoi des choses se trouve dans l’état actuel du marché de logements locatifs livré presque dans sa totalité à la loi de l’offre et de la demande. En effet, il appert du rapport de la SCHL un déséquilibre du marché, occasionné par un excès de la demande sur l’offre, donnant comme résultat un creux historique du taux d’inoccupation des appartements locatifs (1,7% en 2022 pour l’ensemble des centres de 10 00 habitants et plus, alors qu’il était de 2,5% en 2021) et l’augmentation des loyers, atteignant de nouveaux sommets (le loyer moyen pour appartement de deux chambres est de 1000 $ par mois, en hausse de 13,2% pour les logements où il y a eu un changement de locataires. Ce loyer est de 1258 $ à Montréal). Selon les spécialistes, avec un taux d’inoccupation de 1,7%, le marché est désormais déséquilibré (le marché est en équilibre lorsque le taux d’inoccupation se situe entre 3 et 4%), ce qui donne le pouvoir aux propriétaires d’augmenter les loyers et d’évincer les locataires les moins solvables. Malgré un parc de logements locatifs additionnels (près de 95 000 unités achevées depuis 2020), l’offre n’arrive pas à répondre à une forte demande alimentée par la reprise de l’immigration (en 2022, les migrations internationales et interprovinciales fait état d’un gain net de 146 400 personnes à la population québécoise), le retour des étudiants réguliers et internationaux sur les campus et l’augmentation des taux hypothécaires. Ce dernier facteur (taux hypothécaires se situent entre 4,95 et 6,5 %), attisé par les enchères, dissuade de nombreux candidats à l’achat d’une propriété, ce qui augmente la pression sur le marché de logements locatifs. Les taux d’intérêt élevés affectent aussi les entrepreneurs immobiliers dans leurs coûts de construction ou de rénovation de logements, ce qui freine l’offre de logements locatifs et renchérit les loyers.
En effet, la crise du logement au Québec est là pour durer en raison de la pénurie des logements locatifs comme le témoigne le taux d’inoccupation qui est sous le seuil d’équilibre (3%). Dans son bulletin de l’habitation publié en avril 2022, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation au Québec (APCHQ) a estimé qu’il faudra construire environ 100 000 unités (logements locatifs privés, sociaux et pour propriétaires-occupants) pour combler le déficit structurel actuel en logements au Québec. Un défi de taille qui se heurte à plusieurs contraintes : pénurie de main d’œuvre dans le secteur de construction, augmentation des prix de plusieurs matériaux de construction, lenteur des processus de planification et de validation des projets et accroissement des coûts de financement des projets immobiliers.
Sofiane Idir
