Récompensé en tant que meilleur film arabe au Festival du film d’El Gouna en 2019, ainsi qu’au Festival du film francophone d’Angoulême la même année en remportant le Valois du public, le Valois du meilleur scénario et le Valois de la meilleure actrice pour Lyna Khoudri, le long-métrage Papicha de la réalisatrice Franco-Algérienne Mounia Meddour est un hymne contre l’oubli de la tragédie qui a touché l’Algérie durant les années quatre-vingt-dix.
En effet, durant cette période plus connue comme étant la décennie noire, le pays a vécu dix années de terrorisme suite à l’Arrêt du processus électoral de 1991. La suite, on la connait : plus de 250000 morts et un pays meurtri dans sa chair, dont les séquelles psychologiques sur toute une génération devrait faire l’objet d’une analyse généralisée, ou du moins permettre d’exorciser les non-dits pour aller de l’avant.
C’est à mon avis, ce qu’a tenté de faire Mounia Meddour en prenant comme personnages principaux de son histoire, quatre jeunes filles qui se retrouvent à faire face aux interdits à l’intimidation dans un contexte de violence où les civiles étaient pris pour cibles par les terroristes. Pour interpréter les quatre étudiantes, la réalisatrice aura fait appel à Lyna Khoudri dans le rôle de Nedjma ‘Papicha’, Shirine Boutella dans celui de Wassila, Amira Hilda Douaouda pour Samira et Zahra Manel Doumandji pour Kahina.
Les jeunes filles veulent s’exprimer en créant un défilé de Hayek dans la cité des filles. Cependant cette initiative est mal vue par les groupes de salafistes qui font incursion dans le complexe universitaire.
La réalisatrice qui a misé sur les gros plans pour capter les émotions des personnages a probablement eu recours à cette technique cinématographique pour masquer les références urbaines et architecturales qui ont énormément changé en trente à Alger. En effet, même si l’on avait voulu voir des plans de la ville, la postproduction aurait du avoir recours aux techniques de retouches numérique pour créer un environnement du passé. Le choix de plans serrés était donc judicieux pour raconter des histoires d’une jeunesse qui a atteint aujourd’hui la quarantaine/cinquantaine.
Papicha qui est tout sauf un film coup de poing, interpelle autant les algériens que les non-algériens car l’histoire qui est transmise permet de réfléchir à certains sujets et d’élever les consciences.
D’ailleurs, même si le film a été interdit de diffusion en Algérie, il rayonne sur la scène cinématographique internationale en participant au Festival de Cannes en 2019 dans la sélection Un certain regard. Le film était en compétition pour le meilleur premier film au Festival du film de Philadelphie 2019 et il a reçu une mention spéciale du jury au festival Cinemania de Montréal la même année.
Coproduit par la France, l’Algérie, la Belgique et le Qatar, le film sort en salle au Québec à partir du 31 janvier 2020.
Réda Benkoula