Le Rapport sur les services de garde et de soins aux familles expose l’urgence de mettre en place des conditions de travail équilibrées et équitables dans l’industrie de la production cinématographique et télévisuelle canadienne.
La Coalition des femmes du cinéma, de la télévision et des médias numériques du Canada (Coalition WIFT Canada) – en lien avec Reel Families for Change Canada, ont révélé les résultats du Projet de services de garde et de soins aux familles – une étude pancanadienne qui vise à mieux comprendre et quantifier les défis liés à la prise en charge des enfants et des familles en période de pandémie dans le secteur cinématographique et télévisuel.
L’étude conclut que le gouvernement fédéral devrait immédiatement convoquer une table ronde de l’industrie afin d’entamer des discussions avec les syndicats et les employeurs quant à la mise en œuvre des changements proposés à la politique fédérale de crédit d’impôt sur la main-d’œuvre pour que celle-ci favorise la garde d’enfants et les soins à la famille, et ce, d’ici 2024. En même temps, le gouvernement, les employeurs de l’industrie et les syndicats doivent immédiatement mettre en place des conditions de travail équilibrées et équitables au sein de l’industrie canadienne de la production cinématographique et télévisuelle.
Les faits :
* Le financement et la disponibilité des services de garde d’enfants ou de garde familiale, y compris les services de garde culturellement adaptés, sont limités dans l’ensemble de la communauté.
* L’équilibre entre travail et vie privée dans l’industrie du cinéma et de la télévision est particulièrement difficile. Les longues heures, les heures supplémentaires obligatoires et les conditions de travail exigeantes excluent les personnes ayant des obligations familiales ou, à tout le moins, limitent leurs possibilités.
* Les syndicats et les grands joueurs de l’industrie n’ont aucune obligation de s’attaquer à la question des soins aux enfants et aux familles. Plus spécifiquement au Québec où un programme de garderies subventionnées à l’échelle de la province est en place depuis le milieu des années 1990.
* Les chiffres sont nettement meilleurs, puisque seulement 24 % des personnes répondantes ont signalé des problèmes de disponibilité en matière de garderies. Toutefois, le programme de garderies subventionnées du Québec peine à suffire à la demande et est basé sur des horaires de travail « normaux », du lundi au vendredi. Le service n’est pas adapté aux horaires exigeants et atypiques du milieu de la production cinématographique et télévisuelle.
* En général, cependant, le programme de garde d’enfants a connu un grand succès sur le plan de la participation accrue des femmes sur le marché du travail. Le programme québécois illustre bien que les services de garde sont essentiels pour que les parents, en particulier les femmes, accèdent au secteur de la production cinématographique et télévisuelle, et y demeurent, particulièrement dans un contexte où l’industrie a un besoin criant de main-d’œuvre.
Les recommandations
1. Un lien de confiance et des relations saines doivent être établis avec les communautés sous-représentées au sein de l’industrie canadienne. Il y a un manque de représentation équitable et un manque de données sur les travailleurs et les aidants naturels dans l’ensemble du secteur de la production. Des recherches plus poussées doivent être entreprises avant toute chose.
2. Le gouvernement, les syndicats et les employeurs doivent collaborer avec les travailleurs ou soignants pour mettre sur pied, financer et fournir des services de garde d’enfants et de soins familiaux flexibles et culturellement adaptés. Des objectifs et des délais clairs doivent être fixés pour la mise en place d’un programme national de soutien à la garde d’enfants et à la famille dans l’industrie d’ici 2024, en commençant par l’établissement d’une politique globale pour l’industrie canadienne, avec des lignes directrices et des normes, ainsi qu’un cadre de référence pour faire progresser la prestation de services adéquats et équivalents dans toutes les régions du Canada.
3. Les organismes gouvernementaux fédéraux, provinciaux et territoriaux n’autorisent pas actuellement la garde d’enfants en tant que poste budgétaire admissible dans les budgets de production. Afin d’initier un changement structurel, les gouvernements devraient exiger que les services de garde d’enfants et de soins aux familles culturellement adaptés, abordables et flexibles soient inclus dans les budgets de production pour que les projets soient admissibles aux crédits d’impôt fédéraux, provinciaux ou territoriaux pour la main-d’œuvre ou au financement des organismes gouvernementaux, et ce, d’ici 2024.
4. Compte tenu du chevauchement des compétences en matière de délivrance de permis de garderies, notamment entre les provinces et les municipalités, les exigences ne sont souvent pas synchronisées et peuvent prêter à confusion. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux doivent revoir les exigences en matière d’autorisation et de zonage des garderies à l’échelle municipale, provinciale et fédérale afin de permettre l’établissement de garderies comparables et à la demande sur les plateaux des divers centres de production partout au Canada, et ce, d’ici 2024.
5. Le gouvernement, les employeurs et les syndicats doivent immédiatement travailler ensemble pour établir des conditions de travail plus saines, notamment en améliorant la sécurité du travail et en rendant obligatoires des semaines et des heures de travail raisonnables. Par exemple, établir une journée de travail maximale de 10 heures et des semaines de travail de 50 heures.
Quelques statistiques
* Les femmes représentent 93 % des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête
* 86 % d’entre-elles travaillaient dans des entreprises syndiquées
* 27 % d’entre-elles ont déclaré avoir été licenciées parce qu’elles étaient enceintes
* Plus de 82 % des répondantes hors Québec et 59 % des répondantes résidant au Québec ont déclaré avoir du mal à trouver des services de garde d’enfants abordables
* Près de 64 % des répondants hors Québec ont perdu leur emploi en raison de problèmes de garde d’enfants, contre 24 % des répondants québécois
* Les travailleurs syndiqués ne croient pas que leur syndicat ou guilde les appuieraient face à la discrimination parentale et leur attribuent une note de confiance inférieure à 4 sur 10 à ce chapitre. Plus particulièrement, 25 % des répondantes ont accordé aux syndicats une note de confiance de 1 sur 10 par rapport à l’appui que les syndicats pourraient leur apporter face à la discrimination parentale
* Près de 62 % de toutes les personnes interrogées ont déclaré que leurs syndicats et leurs employeurs n’offraient pas d’accommodement aux familles, ou ne savaient pas si leurs syndicats avaient même une politique en matière de garde familiale.
« Plusieurs associations et syndicats de production canadiens ont été très favorables à la promotion de l’enquête du Projet de soins aux familles auprès de leurs membres. Canada WIFT Coalition est en contact avec ces groupes afin de voir dans quelle mesure il est possible d’appliquer des solutions originales et durables pour mettre en œuvre des conditions de travail équilibrées et équitables dans l’industrie de production canadienne. Cela est particulièrement important si le secteur continue de croître et de prospérer, et surtout si l’industrie continue de recevoir des fonds gouvernementaux. » ont déclaré Susan Brinton, autrice et Heather McQuillan, chercheure experte du Rapport sur les services de garde et de soins aux familles.
A propos du Projet
Le Projet de services de garde et de soins aux familles a été commandé par la Coalition des femmes du cinéma et de la télévision du Canada (WIFT Canada), financé par le gouvernement fédéral dans le cadre du Fonds d’urgence pour soutenir les organismes chargés de la culture, du patrimoine et du sport. Ce programme est administré par le Fonds des médias du Canada.
Pour préparer ce rapport, un sondage a été mené, en janvier et février 2021, en collaboration avec Reel Families for Change Canada. Pour étoffer les résultats et les analyses de cette enquête, l’équipe de projet a effectué, à l’aide de données provenant du Canada et du monde entier, des recherches sur les pratiques courantes de garde d’enfants et de travail au sein de l’industrie.
Au total, 322 réponses ont été reçues — avant la fin de l’enquête en février 2020 — de la part de travailleuses et travailleurs au sein l’industrie canadienne de la production cinématographique et télévisuelle. Parallèlement, l’équipe de projet a également effectué des recherches sur les pratiques de garde d’enfants et de travail dans l’industrie à l’aide de données provenant du Canada et du monde entier, ceci afin de compléter l’enquête et d’approfondir les questions clés.
En outre, le Projet de soins aux familles, encadré par un comité consultatif ad hoc composé de membres de WIFT Canada, de Women in View et de Reel Families for Change Canada, a fait l’objet de discussions avec de nombreuses personnes travaillant au sein de l’industrie. Collectivement, leur expertise et leurs contributions ont été inestimables pour le contenu et la rédaction des recommandations de ce rapport.