Cet ouvrage relève un des plus grands défis de la théorie marxiste : la médiation entre la critique de la vie quotidienne et les structures du capitalisme à l’âge du réchauffement climatique. Il s’agit d’une réflexion globale sur le développement capitaliste à l’ère des crises écologiques et comment le mode de production se concrétise dans la vie pratique.

Dans le mode de vie impérial qui est le nôtre, à ce stade avancé du capitalisme marqué par l’impératif de la croissance, les moindres détails du quotidien, la construction de notre identité comme société et comme individus, tout repose sur la constitution d’un ailleurs où nos entreprises exploitent la force de travail comme elles ne peuvent le faire ici, et où nous faisons disparaître nos déchets et fructifier nos surplus.
Cette dynamique impériale est alimentée au quotidien par mille désirs anodins: l’acquisition d’un véhicule neuf grâce au crédit facile, la consommation de fruits et de légumes exotiques ou hors-saison, l’achat d’un ordinateur plus performant. Des habitudes qui ne sont plus l’apanage des pays dits «développés», mais que les pays non occidentaux adoptent aussi, accélérant et exacerbant à leur tour les inégalités et l’externalisation des conséquences écologiques et sociales de cette logique dévastatrice.

L’humanité et la biosphère atteignent aujourd’hui leurs limites et ne pourront bientôt plus fournir l’ailleurs qui nous permet de maintenir ce train de vie à l’origine des crises écologique, économique et politique. Les tentatives de remédier à ces crises pour préserver ce mode de vie se multiplient, mais n’est-ce pas ce dernier qui pose justement problème?

Markus Wissen enseigne à la Berlin School of Economics and Law (HWR). Depuis une trentaine d’années, il mène des recherches sur la crise écologique, tout en étant engagés dans divers projets politiques. Il a notamment travaillé à la fondation Rosa-Luxemburg.

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