Ce texte a été rédigé en réaction aux mesures annoncées par le ministre Morneau en lien avec le programme de subvention salariale durgence dans le cadre de la COVID-19.
Que reste-t-il pour les petites entreprises?
Le ministre des Finances a dévoilé, le 1er avril, un aperçu du programme de subvention salariale durgence du Canada. Nous attendions avec grand intérêt les détails de ce programme afin de connaître le sort des entreprises et des travailleurs en cette crise. Bien sûr, nous appuyons les efforts du gouvernement, qui permettront dassurer le maintien en poste des travailleurs, ressources essentielles à toute organisation lors de la reprise de ses opérations. Mais cette subvention de 75 % sera-t-elle à la hauteur pour sauver nos PME?
Nous en convenons, le programme daide a dû être structuré de façon urgente, ce qui est plutôt inusité pour une mesure de 71 milliards $. Mais dans lurgence, nos PME, qui composent 89,6 % des emplois du secteur privé au Canada, semblent avoir été oubliées. Quen est-il des petites entreprises en croissance? Elles ne connaîtront probablement pas une baisse de revenus de 30 % par rapport à la même période lan dernier puisquavant la crise, elles étaient en pleine croissance, embauchaient des travailleurs et développaient leurs affaires. Quen est-il des start-ups qui nétaient pas en opération à pareille date lan dernier? Noublions pas non plus que la subvention représente 75 % des salaires versés. Or, les PME devront absorber le coût total des charges sociales, en plus de devoir « financer » le tout au minimum six semaines, et ce, sans avoir lassurance de se qualifier selon les paramètres additionnels à être annoncés. Les PME ne comptent souvent quun ou deux actionnaires sur qui repose ce risque financier.
Et quen est-il des grandes sociétés dont les revenus ont subi une baisse de plus de 30 % en raison du marché ou de certaines décisions de ses dirigeants? Et à celles qui ont mis des centaines demployés à pied dans les derniers mois? Vraisemblablement, elles pourront continuer leurs opérations avec une charge salariale subventionnée à 75 %. Ces grandes sociétés pourront sappuyer sur des comptables à linterne pour fournir des résultats financiers à jour et soccuper de la bureaucratie engendrée par les demandes daide à produire. Elles auront aussi accès à des liquidités qui leur permettront de verser les salaires à leurs employés et de supporter le délai dattente pour le remboursement, contrairement aux petites entreprises qui se retrouvent dans une impasse financière.
Plutôt que de comparer les revenus à pareil mois de lan dernier, qui se veut une méthode globale, pourquoi ne pas exiger des indicateurs qui permettraient à des entreprises dans le besoin davoir accès à laide gouvernementale?
Nous proposons doctroyer laide selon la variation des revenus par employé plutôt que dans lensemble de lentreprise. Ainsi, les entreprises en croissance, dont le nombre demployés et les revenus ont crû au cours de la dernière année, mais qui subissent tout de même les contre-coups de la crise actuelle,
pourraient-elles aussi conserver leurs employés. Cette mesure permettrait aux PME de miser sur la formation de leurs travailleurs et le développement de produits qui seront des vecteurs importants de la reprise économique. Nous appuyons également la recommandation de la FCEI (Fédération canadienne de lentreprise indépendante) qui suggère de laisser tomber cette règle de 30 % pour toutes les entreprises et OBNL de petite taille qui maintiennent à lemploi 100 % de leur personnel. Nous recommandons dappliquer cette mesure pour les organisations de moins de 100 employés, qui représentent 69,7 % des entreprises canadiennes.
Nous appuyons le gouvernement du Canada dans sa démarche daide aux particuliers, aux familles, aux entreprises, aux organismes à but non lucratif et aux travailleurs autonomes. Bien entendu, il faut affronter cette crise en tant que société. Nous croyons que toutes les organisations devraient avoir accès à une aide équitable. Sassurer que nos PME et nos OBNL soient prêtes à rebondir après la crise, nest-ce pas la clé de la réussite économique pour lensemble de la communauté?
Annie Bergevin, B.A.A.
Jean-François Simoneau, CPA, CMA