Chaque année, la Fondation du Centre jeunesse de Montréal remet des bourses détudes postsecondaires aux jeunes qui ont fait un séjour en centre dhébergement ou en famille daccueil. Cette aide financière qui en quatre ans a totalisé plus dun million $ permet de poursuivre un parcours scolaire souvent ardu. Et parfois, elle donne limpulsion nécessaire pour démarrer un projet de vie qui change la destinée dun jeune. Voici lhistoire de Walid1, un jeune de la DPJ au parcours difficile, qui a décidé de se relever les manches et de donner au suivant, en allant au front pour combattre la Covid-19 grâce au soutien reçu par la Fondation.
Fugues et délinquance
À partir de 13 ans, ladolescence de Walid est marquée par les crises familiales, la délinquance et les fugues. « Je nétais pas bien à la maison : mon père me battait et jétais souvent en chicane avec ma mère », raconte Walid. « Il y a eu un signalement à la DPJ et à partir de là, jai été dans les centres jeunesse la plupart du temps. Jusquà mes 17 ans, jai fait plusieurs fugues, pas mal de conneries et même si les éducateurs voulaient maider, jétais pas prêt. Pas prêt à être enfermé dans un centre et surtout, pas prêt à être isolé de mes amis. Je voulais la liberté, être contrôlé par personne!
« Puis on ma envoyé à Cité-des-Prairies (CDP). Là où on envoie les garçons qui ont beaucoup de problèmes. Rendu là, je navais plus le choix. Il fallait que je fasse quelque chose.
Le début du secondaire à 17 ans
« Alors jai foncé sur lécole. Javais 17 ans et jétais seulement en secondaire 1. Jétais bon en maths et en français. Comme on avait un prof pour trois élèves, jai avancé vite : deux années en une. Les éducateurs mont beaucoup aidé à CDP. Contrairement à mon père qui restait fâché contre moi après mavoir battu, les intervenants eux, me donnaient des conséquences quand javais pas un bon comportement, mais après, ils étaient pas fâchés.
Puis la Covid est arrivée
« À 21 ans, jai terminé mon secondaire. Javais quitté le centre jeunesse et jétais en appartement. Puis la Covid est arrivée et plus rien se passait. Jai vu quon cherchait des candidats pour être préposé. Je me suis dit que cétait un bon emploi et que jallais être en contact avec plein de gens. Cest ça que jaime, le contact avec le monde!
« Jai été accepté dans la formation et depuis deux mois, je travaille dans un CHSLD. Jaime parler avec les personnes âgées. Une des dames où je travaille a même 103 ans! Cest nice découter leurs histoires. Elles me racontent leurs parcours, ce quelles faisaient avant. Elles vivent dans un univers complètement différent du mien! Je leur demande cest quoi le conseil quelles ont à me donner. Souvent, cest de profiter de la vie!
« Cest trop tôt pour dire que le CHSLD cest une nouvelle famille, mais ce que je peux dire, cest que je les adore!
Un coup de pouce qui fait toute la différence
« Depuis que je suis retourné aux études, la Fondation ma vraiment aidé pour largent. Avant, je ne le réalisais pas. Mais depuis que je suis en appartement, je me suis rendu compte du coût de la vie et jai souvent eu besoin daide pour payer mes livres, mes cours, ma carte dautobus. Si javais pas eu les bourses de la Fondation, cest sûr à 100 % que jaurais arrêté lécole pour aller travailler et que jaurais pas eu de formation. En même temps que je travaille, je suis inscrit au Cégep à temps plein. Ça fait des journées qui commencent à 5 h 30 le matin. Ça, cest vraiment dur!
« Aujourdhui, je suis vraiment reconnaissant envers tous ceux qui mont sauvé. Et lécole et la Fondation en font aussi partie. »
Des bourses détudes pour une transition vers la vie adulte
« Grâce à la générosité de notre communauté de donateurs, nous apportons un soutien aux jeunes qui nont pas dautres alternatives financières. Des jeunes qui, autrement, ne pourraient pas conjuguer études et travail », rapporte Fabienne Audette, directrice générale de la Fondation du Centre jeunesse de Montréal. « Chaque année, ce sont 75 jeunes qui bénéficient de cette aide qui a pour but de les mener à un diplôme, quil soit secondaire, collégial ou universitaire.
« Pour comprendre limportance capitale de ce programme de bourses, il faut comprendre la réalité des jeunes de la DPJ, qui est bien loin de celle dun enfant vivant avec ses parents. Après 18 ans, âge habituel du cégep, nos jeunes ne peuvent pas rester dans leur famille daccueil ou en centre dhébergement. Bien quils soient préparés le mieux possible à la vie autonome, le prix des loyers, surtout à Montréal, le coût du transport, les frais dinscriptions, etc. rapidement ces montants découragent les jeunes de poursuivre leurs études et les envoient sur le marché du travail, sans qualification.
« Notre programme a pour but de favoriser la persévérance scolaire en versant un montant annuel pouvant aller jusquà 3500 $ pour chaque jeune afin de couvrir des frais reliés aux études, tels linscription, les livres, un ordinateur, etc. Toutefois, il va bien au-delà de lappui financier. Cest un soutien humain offert à un jeune devenu majeur et qui souvent, se retrouve isolé. Les gestionnaires du programme font attention au vécu de chacun des boursiers. Ils sassurent que les conditions gagnantes soient réunies pour le maintenir aux études. Sinformer de ses cours, le faire parler de ses défis, lui montrer que sa démarche est importante
les gestionnaires tentent de briser lisolement et daider à gérer lanxiété qui sont souvent des facteurs de risque de décrochage.
« Lexemple de Walid illustre parfaitement bien lobjectif du Programme de persévérance scolaire : établir un projet de vie et recevoir un coup de pouce de la part de la Fondation pour latteindre! Dans le parcours des jeunes de la DPJ, léducation est un élément structurant qui change tout. Chaque fois quun jeune envoie fièrement une photo de son diplôme ou quil endosse son uniforme de travail, cest toute une communauté qui doit lapplaudir haut et fort! »
1 Le nom est peut-être fictif, mais chaque détail de lhistoire est vrai