Les atrocités quotidiennes continuent d’ensanglanter et de détruire toute la Syrie, dans une guerre des plus meurtrières et des plus ravageuses qu’aura connue toute l’humanité. Des générations entières qui garderont à jamais gravée dans leur mémoire, un passé noir et des blessures profondes, des générations brisées, un peuple déchiré. Les témoignages sur cette tragédie syrienne ne manquent pas, ceux de Meriam Hannoun nous ont interpellés par leur intensité, des récits au goût sincère mais amer.
Meriam Hannoun est une romancière syrienne, une main sur le cœur, l’autre tenant sa plume, elle se veut témoin des misères qu’auront causé cette maudite guerre, une survivante combattante qui mène son combat avec comme seule arme, l’inspiration des mots. Meriam est auteur d’un premier roman intitulé « Le quartier du regret», ou elle décrit comment son pays est devenu la proie des milices et des mercenaires criminels, la dureté de la vie, la pauvreté, toutes les misères du monde. Un voyage dans le temps, là où l’espoir s’arrête. Un deuxième ouvrage sortira bientôt, avant la prochaine exposition internationale du Caire, titré par son auteur, « Des jours passent avec mon ami cancer ».
C’est l’histoire d’une femme atteinte d’une tumeur, qui combattit sa maladie jusqu’à ce qu’elle guérisse miraculeusement. Le combat d’une femme seule, livrée à elle-même face à son cancer meurtrier. Le récit de la détresse chez une femme qui incarne cette peur terrible de mourir, de devoir lutter contre le néant. Olivia Descartes, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, ne baissera jamais les bras pour autant, l’espoir divin l’ayant accompagné durant cette période de doute et de malheur. Si en chacun de nous vit une âme protectrice, celle d’Olivia a rencontré la Sainte Marie en rêve, un message divin lui a été soufflé en plein sommeil, à qui elle doit aujourd’hui la vie. Qui aurait cru à une telle histoire ? Est-ce possible ?
Preuves à l’appui, notre écrivaine y fait référence dans son roman, entre étonnement du médecin traitant d’Olivia au moment de découvrir la disparition de la tumeur, et le rétablissement rapide. Elle qui nous dit croire profondément en la force d’Allah Tout Puissant, que dans les moments de détresse, il est important de croire en la force du créateur. Dans son roman, Meriam remonte au plus profond de l’enfance naïve, nous explique comment un enfant doit, dans cette vie parfois sans loi ni cœur, apprendre à affronter cette vie comme elle vient, sans trop se préoccuper parfois des règles. Pourvu qu’il s’en sorte, qu’il puisse naviguer à flot dans un monde irréaliste. La faiblesse étant un frein au bonheur, un obstacle à l’épanouissement, Meriam nous apprend qu’il faut être fort et coriace, afin de rester debout et d’aller de l’avant.
Meriam n’est pas qu’écrivaine, elle est aussi journaliste et écrit pour 12 médias égyptiens. Elle préside également le centre académique international, ou elle anime des conférences dans les domaines de l’écriture, de l’information et du développement humain. Elle est aussi l’auteur d’un ouvrage en comptabilité « La comptabilité commerciale ».
Durant notre entrevue avec Meriam, elle nous apprendra aussi que derrière ce chaos que ses compatriotes en Syrie, vivent chaque jour que Dieu fait, se cache des âmes courageuses, des témoins vivants de ces massacres, lesquels n’ont parfois que les mots pour dénoncer tout ce qu’ont enduré toutes ces familles et tous ces enfants, jusqu’à nos jours.
Le courage et l’audace face à la pauvreté et l’injustice
«…Connaissez-vous le sens de la cruauté de la vie, lorsque l’enfant est contraint de combattre ou de se faire piétiner ? Si je n’avais pas été la plus rapide au jeu du policier, du voleur, au football, et la plus méchante au jeu de cache-cache, mon enfance aurait été sacrifiée. Un enfant faible s’impose à lui-même d’être écarté du jeu par les autres enfants, ces derniers n’ayant qu’un temps réduit pour jouer, d’où leur égoïsme. Les enfants apprenne-t-ils à l’enfant faible les lois du jeu, ou bien ils se contentent de profiter pleinement de ce qui leur convient le plus ?… » Peut-on lire dans un passage du roman. Un réel combat, que lorsqu’un enfant essaie de lutter pour s’imposer dans une vie cruelle, injuste.
Et comme pour démontrer que la vie n’appartient qu’aux hypocrites, qu’il faut absolument s’aligner pour survivre, notre romancière culpabilise la réalité dans un monde ou les sentiments sont égarés et mal compris. « …Mon âme me fait souffrir en sachant que je réussis quelque chose, et je dois payer pour que tout succès soit atteint…La transparence n’existe pas dans une meute de loups, et celui qui s’exprimera avec son cœur sera traité de stupide et naïf…L’amour, ma chère, n’est pas un mot ou un temps perdu pour le divertissement, c’est un recueil de sentiments issus de la tempête, qui se transmettent à l’individu par le choix aveugle, il s’en contente et renforce le secret du destin. L’amour appartient à l’égoïste inné… », Affirme-t-elle plus loin dans son récit.
Meriam avoue avoir le cœur déchiré par l’injustice aveugle, mais cette force qui jaillit en elle, lui montre la voie, lui donne du courage et les armes pour combattre le quotidien amère des jours malheureux. « …Je ressemble à la malédiction des pharaons quand j’ai découvert ce fait, j’ai utilisé cette malédiction pour bâtir la gloire, et si je n’avais pas profité de ce que je suis, j’aurais puni l’humanité et je l’aurais privée de ce moyen de vie intellectuel abondant. Si j’avais orienté mes pensées vers le mal, le diable aurait quitté le pays, comme l’ont fait tous ceux que je connais, ils n’ont plus leur place. La pauvreté épuise l’âme et retire les énergies de production personnelle de tout individu. Je sens que j’ai hérité de l’injustice qui a frappé ma mère… », Écrit-t-elle, dans la mélancolie la plus profonde.
Le cancer, une effroyable expérience !
« …Le médecin m’a demandé : où est votre père ?
– Je lui répondis que c’était moi
« Votre mère, vos frères ou camarades ! Des proches par exemple ? Réplique-t-il
…Le désastre, c’était qu’il ne souriait pas, alors je m’attendais à quelque chose de mal, ensuite il me dit : je vous le dirai si quelqu’un comme vous n’a pas peur.
– Je regardais ses lèvres en étant dans un état de terreur comme jamais je ne l’avais été dans ma vie.
Puis il me dit : « Il y a une tumeur, et baisse la tête comme pour me dire désolé pour la mort qui t’attend.
-Je n’ai pas pleuré, sachant que les larmes au bord de ma paupière ne pourraient jamais tenir, comme si une armée de fourmis montait sur mes pieds. J’ai ressenti ce que certains disent dans les situations les plus pénibles : Mon dos est cassé. Jamais de ma vie je n’ai été choquée de la sorte.
-Je n’ai pas pleuré, sachant que les larmes au bord de ma paupière ne pourraient jamais tenir, comme si une armée de fourmis montait sur mes pieds. J’ai ressenti ce que certains disent dans les situations les plus pénibles : Mon dos est cassé. Jamais de ma vie je n’ai été choqué de la sorte.
Meriam Hannoun : « La foi en Dieu et la confiance en soi peuvent aider les gens à surmonter les misères de la vie »
« L’histoire d’Olivia Descartes est une histoire vraie, elle s’est terminée par une guérison miraculeuse. Durant une longue maladie, elle fit un rêve, ou la Sainte Marie lui révéla : « Je suis venue pour t’aider, n’ai plus peur ». Lors d’un contrôle médical, les médecins ont été surpris de cette guérison miraculeuse, des radios et des analyses attestent que la tumeur était bien là, mais qu’elle avait subitement disparue. Durant sa maladie, elle se souciait de ses proches, faisait du bien autour d’elle, mais ne recevait rien en retour. Elle dû combattre seule cette maladie, sans l’aide de personne, entre travail et beaucoup d’autres obligations journalières. Une tumeur qui se manifestera quelque temps après un divorce, une femme livrée à elle-même, n’ayant qu’Allah pour prier. Je publierais à la fin de mon roman, des preuves de cette guérison spirituelle et comment cette femme s’est débarrassé du jour au lendemain de ce cancer qui la rongeait chaque jour un peu plus. Une histoire qui démontre à quel point la foi en Dieu et la confiance en soi peuvent aider les gens à surmonter les misères de la vie. Comme un miracle qui fait que lorsqu’on se retrouve seul sans l’aide de personne, il n’y a que Dieu sur qui compter. »
« Une guerre en Syrie que l’humanité n’a jamais connu »
« Nous vivons en Syrie une guerre que l’histoire de l’humanité n’a jamais connue. Un dollar vaut 1000 livres syriennes, et chaque famille doit débourser pas moins de 30 000 lires chaque mois. Dans mon premier roman « Le quartier du regret», je parle de la guerre et de ce que le peule a enduré. Un peuple qui s’est résigné, un peuple atteint mentalement. Notre société s’est divisée en deux catégories. Il y a la première, les mercenaires de la mort, et dans l’autre camp, il y a les victimes de la guerre. Les mercenaires, ce sont les trafiquants d’organes, d’armes et de drogues, motivés dans leurs crimes par l’argent. Leurs victimes sont des hommes, des femmes et des enfants syriens qui n’ont plus que Dieu pour les secourir. Dans chaque quartier, il y a des groupes terroristes. Quand il n’y a pas la mort, c’est la pauvreté et la misère qui la remplace. Les gens sont exploités par cette mafia. Nous avons connu des jours où il pleuvait des roquettes en plein quartier, dans chaque famille, il y a au moins un mort, ou un mutilé, ou un disparu. Rares sont ceux qui réussissent à s’en sortir en ces temps de guerre, beaucoup de générations ont été brisées.
« Je suis passé par des moments vraiment difficiles, je suis fière de ne pas avoir baissé les bras »
«Chaque jour que Dieu fait, je me lève le matin avec l’objectif de réaliser quelque chose de grand, sinon, je n’en dors pas la nuit. Je compte chaque jour, chaque heure, chaque minute. Supposons que je vive encore 35 autres années, cela me suffira à construire mon empire personnel. Durant cette guerre, j’ai tenu le coup grâce à l’écriture, sans elle, je n’aurais pas pu résister. Je suis passée par des moments vraiment difficiles, mais aujourd’hui, je suis fière de ne pas avoir baissé les bras. Je continuerais à le faire jusqu’à ce que mon nom soit connu dans le monde entier. Dans mes projets, je compte traduire ce nouveau roman en français et en anglais, et viser ainsi un plus grand nombre de lecteurs à travers le monde.
Propos recueillis par Hamid Si Ahmed