Les noces fabuleuses du Polonais l’œuvre de Fouad Laroui qui vient de paraître peint avec détails les paradoxes que peut vivre une société qui baigne dans le mensonge. Prénommé Matchek, le jeune dentiste polonais qui a débarqué au Maroc avait souhaité assister à un mariage. L’unique façon de lui faire profiter de ce spectacle c’était de l’organiser en son propre nom. Il était le marié et une femme, Daouia allait être son épouse. On a converti le dentiste à l’islam tout en lui faisant croire que c’était faux mais il fallait qu’il prononce la phrase qui valide son entrée en islam. Il déforme selon ce qu’il avait saisi: « layla yla la, Mokhamid rasûl layla »[1]. Dans cette mascarade, Matchek n’a à aucun moment douté de ce qui se tramait. En fait, c’est l’ouvrier Moussa qui avait mis en place toute cette scène pour marier sa cousine qui était divorcée deux fois, bien qu’elle n’avait que vingt ans. Toutes les factures générées par l’organisation du mariage ont été réglées par Matchek. Après la nuit de noce, il a été surpris de voir que Daouia reste chez lui. Malgré son étonnement, il s’est laissé bercer par le quotidien où la maison était très bien entretenue et où les plats étaient cuisinés avec goût: « Les jours passèrent, et puis les semaines. Le polonais ne fréquentait plus le Café de la poste. Il avait rompu avec la classe ouvrière, et en premier lieu, avec ce Moussa qui l’avait mis dans ce pétrin (certes délectable, en fin de compte, mais tout de même…). Daouia, qui se révéla être une femme de tête, avait mis de l’ordre dans la vie de Matchek »[2]. Il a eu deux enfants, Adam et Hanna: « Avec leurs deux enfants, Matchel et Daouia formaient un couple casanier, très uni, qui ne sortait quasiment jamais. Il faut dire que leur grande villa, avec son beau jardin, sa pelouse et ses arbres fruitiers, leur suffisait amplement »[3].

I-L’Histoire comme point de repère:              

Les noces fabuleuses du polonais qui est le titre de la première histoire comprend d’autres nouvelles. Elles s’intitulent: Le père, le fils et le vengeur masqué, La toile mystérieuse, Géométrie de l’amour, trois mensonges de Torrès. Rappelons que Géométrie de l’amour représente un dialogue entre deux enseignants qui débattent sur la notion de l’amour. C’est à ce titre que les grands noms de la culture arabo-andalouse prennent toute leur place: « Naîma: Est-ce que tu sais que l’amour courtois a ses origines dans la littérature arabo-andalouse? C’est Ibn Dawoud, au XIème siècle, qui l’a codifié Et il y a aussi Le collier de la colombe d’Ibn Hazm qui a transmis la notion d’amour platonique aux troubadours »[4]. Dans ce débat, nous assistons à de multiples contradictions que vit l’homme: « Naîma: Foutaises? Foutaises? Et les fleurs que tu m’apportais, au début, il y a trois mois? Hein? Et les billets doux que tu me glissais dans la main? Et les déclarations enflammées que tu me faisais? C’étaient des foutaises, tout ça? Et ces nuits qu’on a passées ensemble, quand ta femme était de garde à l’hôpital? Et ces promesses…Tu m’en faisais encore hier! »[5].

Le livre Les noces fabuleuses du polonais représente une réflexion profonde sur l’intégration de l’homme dans la société. Il ne peut trouver son équilibre qu’en étant capable de distinguer le vrai du faux.

[1] Fouad Laroui, Les noces fabuleuses du polonais, Ed/Julliard, 2015, p. 26.

[2] Id, pp: 56-57.

[3] Ibid, pp: 58-59.

[4] Ibid, p. 137.

[5] Fouad Laroui, Les noces fabuleuses du polonais, Ed/Julliard, 2015, p. 144.

By Lamia Bereksi Meddahi

Lamia Bereksi Meddahi est l’auteure de la première thèse de doctorat sur le dramaturge algérien Abdelkader Alloula. Elle a publié La famille disséminée, Ed/marsa, 2008, une pièce de théâtre Dialogues de sourds, Ed/L’harmattan, 2014. Elle enseigne à l’université Paris XII et se consacre à la littérature maghrébine ainsi que le théâtre dans le monde arabe. Depuis 2014, Lamia est membre de l’équipe éditoriale au journal L'initiative.

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