Créé par le scénariste Jean Van Hamme, le personnage de Largo Winch est élevé depuis plusieurs années au panthéon des bandes dessinées à succès au point d’être adapté en jeux vidéo, en série télévisée et au cinéma. Il faut dire qu’après 22 volumes qui ont été traduits en différentes langues et plus de 400 millions d’albums vendus, ce héros continue à nous passionner aussitôt que l’on plonge dans l’univers de ce milliardaire au passé atypique et au destin tragique.

À travers chaque album, Jean Van Hamme nous en apprend un peu plus sur l’héritage, la vie, les amis et les amours de Largo Winch, au point où on a l’impression de cerner le personnage, avant que son auteur ne nous rappelle grâce à son imagination foisonnante qu’il n’en n’est rien en découvrant une nouvelle aventure.

Comment on le sait, Largo Winczlav est l’enfant adoptif et l’héritier de Nerio Winch. Cependant l’origine de La fortune des Winczlav reste inconnue. Il n’en fallait pas plus à Jean Van Hamme pour réparer cet impair en se focalisant cette fois-ci sur l’histoire de cette famille à travers une saga en 3 volumes et un premier tome s’intitule qui Vanko 1848[1].

L’œuvre qui débute dans les Balkans vers le milieu du 19e siècle, suit le parcours de Vanko Winczlav à l’heure où la vieille Europe traversait de grands bouleversements qui allaient changer la carte géopolitique du monde.

Et pour mieux nous aider à nous situer dans l’histoire des Balkans Jean Van Hamme débute l’œuvre par une demi-page qui résume de manière succincte les événements qui ont lieu dans le monde vers 1848. Cette introduction historique donne le ton pour saisir les raisons qui ont poussé Vanko Winczlav un Serbe du Monténégro de 25 ans à mener la résistance contre l’occupant turc. Ce jeune médecin dont la tête est mise à prix doit fuir tour à tour son village, puis Dubrovnik en passant par l’Albanie pour finalement rejoindre le Nouveau Monde. Ce périple tortueux de Vanko en compagnie de Veska Stojanova qu’il épousera pour des raisons pratiques car celle-ci n’a pas de papiers d’identité, signe aussi le début d’une vie qui est parsemée d’embuches et de défis pour cet homme dont le nom restera à jamais difficile à porter pour lui et pour les siens. En effet, quelques temps après leur arrivée aux USA, Veska accouche d’un petit Sandor qu’elle abandonne à Vanko. Celui-ci l’élève comme son fils et se remarie avec Jenny une infirmière qui lui donnera par la suite un fils qu’ils prénommeront Milan.

Sans entrer dans les détails de cette saga familiale, on veut en apprendre plus à propos de la famille à Largo. Pour cela on prend le temps de s’imprégner du moindre détail du premier des trois tomes annoncés par Jean Van Hamme. L’auteur qui est connu pour ses œuvres monumentales telles que Thorgal, livre petit à petit avec les Winczlav les secrets de cette famille de « self-made men » qui poursuivent inlassablement leur chemin.

Au niveau graphique, Philippe Berthet se charge des dessins de cette trilogie qui nous fait voyager dans une autre époque grâce à l’imagination fertile du bédéiste. Et pour le moins que l’on puisse dire, le dessinateur a une facilité à se projeter dans l’histoire en illustrant des œuvres qui sont bien ancrées dans leur temps comme on peut le voir dans les séries Nico et Pin-up dont les évènements se déroulent dans les années quarante ou encore dans la série Les Exploits de Poison Ivy qui se déroule dans les années trente. Lui qui a publié en 2020 De l’autre côté de la frontière, jongle avec les époques avec la saga des Winczlav puisqu’il nous permet d’apprécier les différences culturelles, architecturales et vestimentaires que l’on pouvait apercevoir des Balkans jusqu’aux limites du Far West.

Il est certain en tout cas que ce premier voyage dans le temps à travers trois générations des Winczlav est annonciateur de nombreux autres secrets que Jean Van Hamme et son complice Philippe Berthet garderont jalousement jusqu’à la fin de cette trilogie.

Réda Benkoula

[1] La fortune des Winczlav T.1 : Vanko 1848 | Jean Van Hamme (Scénario), Philippe Berthet (Dessin) | Dupuis | 2021 | 56 pages

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