C’est à un drame que nous convie Catherine-Anne Toupin avec sa nouvelle pièce La Meute. Il y a de la détresse, beaucoup de détresse, et de l’angoisse aussi. On a pourtant beaucoup ri. Troublant? Pas tout à fait. L’humour peut occulter bien des atrocités.

La pièce s’ouvre avec Sophie (Catherine-Anne Toupin), juchée sur scène, avec un texte polyphonique. On apprend qu’elle a perdu son emploi et qu’elle doit fuir, et vite. Sophie part pour la campagne et tombe chez Louise (Lise Roy) et Martin (Guillaume Cyr). Ils l’ont accueilli et ont rapidement compris que les choses n’allaient pas très bien. Du repos, c’est ce qu’ils lui ont suggéré. La nuit s’écoule, les journées passent et une relation d’amitié s’installe entre Sophie et Martin, « un gars d’humour » qui vit aussi des moments difficiles puisqu’il a perdu son emploi. Malgré cela, il fait rire Sophie. Elle semble reprendre du mieux, mais elle est toujours perdue dans une cacophonie intérieure qui la tourmente. On entend des propos injurieux et des menaces. Que s’est-il passé? Dans quel marasme est-elle prise? Quelle sorte de violence frappe à ses portes? On l’a dit, la pièce est un drame et elle est énoncée sous forme de thriller.

La meute est un récit sur nos violences. Les violences contemporaines auxquelles nous assistons malgré nous, et ce, tous les jours, par exemple dans ce qu’on a convenu d’appeler les réseaux « sociaux ». Sociaux? N’est-ce pas là où les liens sociaux sont piétinés impunément à coups de sexisme, de xénophobie, etc? La meute amène de cette manière le spectateur à s’interroger sur cette violence qui, aujourd’hui, n’a rien d’anodin ni de surnois. Bien au contraire. Il semblerait que derrière l’anonymat, plusieurs s’arrogent « le droit » d’écrire ce qu’ils veulent. Le droit? C’est un débat qui est lancé par la pièce.

 

Les mots blessent, et beaucoup. Avec La meute, le public saisit rapidement cette force de frappe en pleine figure. Il retient aussi son souffle jusqu’à la toute fin pour comprendre les tenants et aboutissants de cette histoire. Le pari de Toupin est donc réussi, et ce, sur le texte et sur la scène. Enfin, face à la violence, doit-on riposter par la violence? C’est une autre question laissée en suspend par La meute. Toutes des questions qui sont pertinentes et nécessaires aujourd’hui.

La Meute | Du 16 janvier au 17 février, ainsi qu’une série de représentations supplémentaires du 7 au 16 juin 2018 au théâtre La Licorne | Production La Manufacture | Texte Catherine-Anne Toupin | Mise en scène Marc Beaupré| Avec Guillaume Cyr, Lise Roy et Catherine-Anne Toupin | Assistance à la mise en scène Marie-Hélène Dufort Décor, costumes et accessoires Odile Gamache Éclairages Julie Basse et Étienne Boucher Musique Alexander MacSween Vidéo HUB Studio / Antonin Gougeon-Moisan | Durée : 1h30 sans entracte| Prenez note qu’il y a des effets stroboscopiques dans le spectacle.

Eduardo Malpica Ramos

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