Même si la pandémie avait mis en léthargie l’activité économique du pays à deux reprises, avec en corollaire une baisse des revenus, cette crise aurait, cependant, un effet surprenant sur les finances des Canadiens. Forcés à restreindre leurs dépenses lors des deux confinements imposés par la pandémie, les ménages canadiens ont renfloué leurs comptes en banque, constituant une épargne de 180 milliards de dollars en 2020, soit 5 800 dollars par Canadien (Banque du Canada, mars 2021). Selon Statistique Canada, les Canadiens ont épargné en 2020 un montant comparable à celui des sept années précédentes combinées. Le taux d’épargne des Canadiens (rapport de l’épargne sur le revenu disponible) pour l’année 2020 s’est établi à 15,1 %.

Ce record historique de liquidité constitue une manne qui pourrait soutenir la reprise économique en invitant les ménages à dépenser davantage lors de l’après-pandémie ! Comment cette épargne a été accumulée dans les circonstances afférentes à la crise sanitaire ? Et comment ces économies seront utilisées par les ménages canadiens une fois que la pandémie sera terminée ?

Épargne pléthorique des Canadiens : facteurs explicatifs

En effet, la hausse explosive de l’épargne des ménages canadiens est le résultat de la conjonction de deux facteurs. D’un côté, la contraction des dépenses en raison de la crise sanitaire. Les Canadiens ont déboursé moins en services personnels, en restauration, en loisirs et en voyage. Il faut noter que le télétravail a exacerbé cette contraction en diminuant certaines dépenses (vêtements, essence, restauration…). Selon Statistique Canada, les dépenses des ménages ont baissé de 6,1% en 2020 par rapport à 2019, soit en moyenne 4000 dollars de moins par habitant. De l’autre côté, et malgré les pertes d’emploi et, du coup, des revenus, les mesures exceptionnelles de soutien des gouvernements (fédéral et provinciaux) ont permis de soutenir le revenu disponible des ménages. Selon la Banque du Canada, le revenu disponible du Canadien moyen a augmenté de 1800 dollars en 2020. Ce sont, en effet, 105 milliards qui ont été transférés aux ménages comme soutien direct, soit 3400 dollars par Canadien de 15 ans ou plus.

Comment cette épargne abondante sera-t-elle utilisée ?

En effet, il est peu commode de prédire quel usage feront les Canadiens de leurs économies. Utiliseront-ils cette épargne pour rembourser leurs dettes, ou se donneront-ils à une consommation de rattrapage une fois que la pandémie sera révolue. En effet, injecter une partie de cette épargne (180 G$) dans le circuit économique via la consommation ne peut que générer un cercle vertueux pour l’économie du pays (augmentation de la demande, hausse de la production, augmentation de l’embauche, baisse du taux de chômage…).

Selon l’hypothèse d’un effet de rattrapage, la Banque du Canada a examiné un scénario dans lequel la consommation de certains biens et services serait plus élevé que d’habitude en raison de la demande jusque-là refoulée. Selon ce scénario, la Banque centrale estime que les ménages dépenseraient environ 25 milliards de dollars, soit 15% de leur épargne. Le gros de ces dépenses sera affecté aux services à forte proximité physique (transports, hébergement et restauration), ce qui augmentera la demande en main d’œuvre. Cette dynamique permettrait une création annuelle d’environ 30 000 emplois pour les trois prochaines années, ce qui profitera aux entreprises et aux travailleurs les plus touchés par la pandémie.

Sofiane Idir

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