Le FOREX (foreign exchange) ou le marché des devises est le plus grand marché au monde en termes de volume de transaction. C’est sur ce marché, entièrement dématérialisé et décentralisé, que le taux de change entre les devises est fixé. Depuis l’adoption du régime des changes flottants dans les années 1970, le marché des devises a pris de l’ampleur, propulsé par les progrès techniques, notamment l’avènement des logiciels de trading haute fréquence.
Malgré le ralentissement de l’économie mondiale en raison des mesures sanitaires liées à la pandémie et les politiques monétaires accommodantes des Banques centrales, le marché des devises est resté à l’abri des grands soubresauts. Si la tendance baissière du dollar américain est maintenue en ce premier trimestre, cela dit, plusieurs monnaies ce sont appréciées par rapport au billet vert.
Parmi ces monnaies, figurent le yuan chinois qui s’échange autour de 6,50 yuans /$ US et le dollar canadien, fluctuant aux alentours de 0,79 $ US et qui avait même atteint en février la barre psychologique des 0.80 $ US. L’appréciation du huard par rapport au dollar américain n’est pas sans conséquences sur l’économie canadienne qui demeure fortement liée à l’économie des États-Unis en raison non seulement de la proximité géographique, mais également des traités commerciaux. Comment expliquer la vigueur du huard et quelles sont les conséquences de cette ascension sur les entreprises canadiennes ?
Explication de la montée du dollar canadien
En effet, il y a plusieurs éléments fondamentaux qui peuvent influencer le prix d’une monnaie par rapport à une autre. La valeur d’une monnaie est déterminée en grande partie par la santé de l’économie qu’elle présente. Par ailleurs, d’autres facteurs peuvent faire évoluer le cours d’une monnaie à la hausse ou à la baisse (politiques monétaires des Banques centrales, volume des importations et des exportations, relations politiques et géopolitiques…). Dans leurs prévisions des devises (27 janvier 2021), les économistes du Mouvement Desjardins expliquent la remontée du huard par le fait que la plupart des prix des matières premières et du pétrole demeurent à un niveau élevé, ce qui offre un soutien à la monnaie du pays dont les exportations en la matière sont importantes.
À vrai dire, la dépréciation du dollar américain, avec en corollaire l’appréciation du dollar canadien, est due à l’augmentation de la masse monétaire aux États-Unis (augmentation des déficits budgétaires, l’achat des obligations par la Réserve fédérale…). Et comme la majorité des matières premières, notamment le pétrole sont libellées en dollars américains, la baisse de la valeur du billet vert entraine l’augmentation des prix des matières premières, ce qui profite aux exportations canadiennes (la part des matières premières dans les exportations canadiennes est de 25%). Ainsi, les entreprises du secteur des ressources naturelles sont plus rentables, ce qui attire les investissements et renforce l’économie canadienne, en exerçant une pression à la hausse sur le dollar canadien.
L’appréciation du dollar canadien et ses répercussions sur les entreprises canadiennes
L’appréciation du huard profite aux entreprises du secteur des ressources naturelles qui augmentent leurs revenus et leurs investissements. Le commerce de gros tire profit aussi de cette appréciation en diminuant la facture des importations. Il en est de même pour les consommateurs qui profitent de la baisse des prix des produits importés. Par contre, l’envol du dollar canadien peut être un frein aux entreprises exportatrices relevant du secteur manufacturier, notamment celles qui dépendent largement des exportations (secteur forestier). Le secteur touristique peut aussi en pâtir de cette appréciation, car le coût du voyage au Canada pour les touristes étrangers sera plus onéreux. En revanche, ces mêmes entreprises peuvent profiter de la baisse de la facture d’importation des équipements et de technologies pour moderniser leur chaine de production afin d’augmenter leur productivité et leur compétitivité.
Sofiane Idir