Deux parutions cette semaine chez LUX éditeur: Les empoisonneurs par Sébastien Fontenelle et Passés singuliers de Enzo Traverso
Quotidiennement, des agitateurs prennent d’assaut les tribunes pour attiser colères identitaires et passions xénophobes. Leur brutalité verbale, qui vise principalement les «migrants» et les «musulmans», rappelle la violence de ceux qui, dans la première moitié du siècle précédent, vilipendaient les «métèques» et les «juifs». De la même façon que les droites d’antan vitupéraient contre le «judéo-bolchevisme», leurs épigones fustigent l’«islamo-gauchisme», qu’ils associent à l’antisémitisme.
Or ces mêmes accusateurs font parfois preuve d’une étonnante complaisance lorsqu’ils se trouvent confrontés, dans leurs alentours culturels et idéologiques, à des considérations pour le moins équivoques sur les juifs ou sur l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Soudain ils deviennent magnanimes et peuvent même trouver à leurs auteurs des circonstances atténuantes. Et ainsi se perpétue l’abject.
Sébastien Fontenelle est journaliste et chroniqueur à Politis. Il est notamment l’auteur de Les briseurs de tabous (La Découverte, 2012) et Les éditocrates 2 : le cauchemar continue (en collaboration, La Découverte, 2018).
En librairie le 3 septembre I 216 pages I 16,95$
L’histoire s’écrit de plus en plus à la première personne. Les historiens ne se contentent plus de reconstituer et interpréter le passé; ils ressentent désormais le besoin de se raconter eux-mêmes. Un nouveau genre hybride a pris forme, exemplifié notamment par les ouvrages d’auteurs comme Ivan Jablonka ou Philippe Artières, qui font le récit de leurs enquêtes et décrivent leurs émotions dans un style très littéraire. Inversement, dans le sillage de Patrick Modiano et W.G. Sebald, certains écrivains tels Javier Cercas, Éric Vuillard ou Laurent Binet font bouger la frontière entre vérité romanesque et vérité historique, en créant des «romans non fictionnels».
Cet essor du moi soulève des questions épistémologiques et d’autres, plus profondes, concernant le monde dans lequel nous vivons, sa nouvelle raison néolibérale et l’individualisme qui la caractérise. Dans cet essai, Enzo Traverso interroge ce tournant subjectiviste dont il souligne les potentialités créatives, les ambigüités politiques et les limites intrinsèques.
Enzo Traverso est né en Italie en 1957. Après avoir vécu et enseigné en France, il est actuellement professeur de sciences humaines à l’université Cornell (Ithaca, New York). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, traduits en une douzaine de langues, parmi lesquels À feu et à sang. De la guerre civile européenne 1914-1945 (2007), L’histoire comme champ de bataille. Interpréter les violences au XXe siècle (2010) et Mélancolie de gauche. La force d’une tradition cachée, XIXe – XXIe siècle (2016).
En librairie le 3 septembre I 232 pages I 24,95$