Depuis quelques années, le néologisme « ubérisation » est davantage utilisé dans les médias. Il a été employé pour la première fois par Maurice Lévy, le patron de Publicis, lors d’une interview accordée au Financial Times, fin 2014. L’origine de ce terme renvoie au nom de la start-up californienne Uber, qui concurrence les taxis grâce à sa plateforme numérique qui offre un service de véhicules avec chauffeur. Ce terme désigne donc la concurrence faite par les startups innovantes en plein essor, tirant partie des possibilités numériques, pour les entreprises dominantes traditionnelles. Il évoque ce basculement rapide des rapports de force en faveur du numérique. Depuis, son utilisation s’est élargie pour contenir d’autres acceptions qui dépassent le strict cadre de la concurrence économique pour désigner un modèle économique où les entreprises se servent des technologies numériques pour réduire leurs coûts, en se passant des intermédiaires classiques pour entrer en contact direct et instantané avec le consommateur.

Aujourd’hui, ce phénomène prend une ampleur considérable et en train de restructurer l’économie et l’emploi, en gagnant de nombreux secteurs économiques tels que l’hébergement touristique, les services juridiques, les services aux entreprises ou aux particuliers, la traduction, l’éducation…

De quelle manière l’ubérisation change-t-elle le monde du travail ?

L’ubérisation bouscule indéniablement le marché du travail en changeant ses mécanismes de fonctionnement et en créant de nouveaux acteurs (mutations du statut des travailleurs). Ils sont chauffeurs pour Uber, hôtes pour Airbnb ou jardiniers pour FamiHero. Ces acteurs, quels que soient leurs statuts (travailleur autonome, auto-entrepreneur, freelance…), sont de plus en plus utilisés par les startups numériques, en contournant les règles de droit du travail et ses contraintes (charges sociales, rigidité du contrat, syndicat…).

L’utilisation croissante de ses travailleurs indépendants a amené certains spécialistes comme Jean-Pierre Goudard (2013) à prédire déjà la fin du salariat. On n’en n’est pas encore là, car l’emploi salarié, selon l’Organisation international du travail (OIT) représente la moitié de l’emploi dans le monde (rapport sur l’emploi et questions sociales dans le monde 2015). En effet, l’utilisation de cette catégorie de travailleurs devra cohabiter avec l’emploi salarié rapportent d’autres spécialistes. Pour l’économiste Jean Charles Simon (2016), la fin du salariat n’est qu’un fantasme: aucune donnée ne vient confirmer son recul dans les grandes économies. « Il y a des activités qui se développent en indépendant, d’autres qui reculent, par exemple dans le commerce et l’artisanat. Et beaucoup d’entreprises du numérique, comme Amazon, finissent par prendre des salariés. », précise cet économiste.

Si l’ubérisation a un impact positif sur l’emploi en facilitant l’accès à certains services qui génèrent de nouvelles demandes (effet stimulant pour l’économie), ce phénomène serait aussi destructeur d’emplois, notamment du tertiaire. Les destructions d’emplois occasionnées par l’ubérisation demeurent difficiles à quantifier, car il s’agi d’un processus très évolutif et peu commode à anticiper. En effet, l’ubérisation, qui repose largement sur un modèle qui s’affranchit du cadre fiscal et de la protection sociale pour réduire au maximum les coûts des services offerts, ouvre le débat sur la qualité des emplois créés et la protection des personnes qui les exercent. Les préoccupations qui se font entendre, illustrées par les revendications des conducteurs d’Uber, sont celles d’une précarisation plus accrue de l’emploi (temps partiel, faible rémunération, horaires imprévisibles, absence de protection sociale…).

Sofiane Idir

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