Algérie (Tiaret) – A l’ occasion de la commémoration du déclenchement de la révolution de libération nationale (65e anniversaire), l’association culturelle «Er Rouchd» a organisé au théâtre communal « Houari Boumediene» de Sétif, du 28 au 31 octobre derniers, la 6e édition du Festival national de la chanson Chaâbi.
En la présence du wali de Sétif, Mohamed Belkateb, du président de l’APW et des autorités locales, et d’un public des plus chaleureux, 27 artistes venus des quatre coins du pays,ont interprété plusieurs de leurs œuvres et d’anciennes chansons du terroir, une initiative portant à la préservation de la mémoire collective d’un extraordinaire patrimoine culturel algérien. Durant quatre jours, les anciennes mélodies ont ressurgit du passé, sur des airs des regrettés cheikh Mohamed El Anka, Boudjemaa el Ankis, Guerouabi, et bien d’autres encore. Un style ancien, certes, mais qui trouve toujours ses adeptes parfois parmi les plus jeunes, et pas seulement dans les villes du centre, mais dans différentes wilayas du pays.
Une sixième édition marquée par l’organisation d’un concours national, dont le vainqueur n’est autre que notre interlocuteur, Fayçal Boukhtache, jeune chanteur chaâbi originaire de Tiaret, capitale des « Rostomides ». Agé de 30 ans, ce jeune vétérinaire de formation commencera par la guitare en 2003, avant de rejoindre le conservatoire en 2009, ou il étudiera la musique classique avec le professeur Dahou Guitoun. Il forme son groupe Rostomia en 2010, il sort son premier album en 2016, sous la supervision du grand poète Ahmed Bouziane de Tiaret, très connu en Algérie par le Malhoun (poésie populaire écrite en arabe maghrébin). Un album qui fera le tour de grands medias à travers la radio, notamment la Chaîne 1, Chaîne 3, Bahdja…etc). Riche d’une équipe de sept artistes, Rostomia a en tout 3 albums sur le marché.
Le groupe Rostomia a participé entre autre à plusieurs festivals et soirées culturelles de la musique chaâbi. Parmi ses projets en cours, deux singles avec clip vidéo, il sera bientôt disponible sur le marché ! Influencé par le maître de la poésie populaire cheikh Ahmed Bouziane, Fayçal affichera une préférence sur le produit des anciens, sans pour autant négliger son propre style, ou le traditionnel et le moderne, peuvent cohabiter en harmonie.
    
La chanson algérienne entre tradition et modernité
Les chansons et les mélodies qui ont accompagné nos parents depuis leur enfance jusqu’à nos jours, ont naturellement perdu de leur pétillant chez les plus jeunes d’entre nous. En mode PNL, Soolking ou bien l’Algérino pour les moins jeunes et les ados, la chanson du cru algérien tend à s’effacer avec la mutation des sociétés vers un mode de consommation modernisé, digitalisé. Même le chaâbi et le raï, deux styles qui s’imposent encore sur la scène artistique algérienne, ont perdu de leur éclat, rien ne sera plus comme avant. Que dire du style Chaoui, touareg ou kabyle, généralement prisé dans la région d’origine, au détriment d’autres genres musicaux. Que sont devenus nos orchestres de musique andalouse ?
Les historiens et autres chercheurs algériens mettent ainsi l’accent sur l’urgence de redécouvrir la chanson traditionnelle, histoire de la remettre en valeur, mais surtout de ressusciter tant de styles musicaux qui ont accompagné l’Algérie dans ses grandes phases historiques. Et dans le souci de stimuler ces styles anciens et de leur procurer un nouveau souffle, les professionnels et connaisseurs appellent à une certaine mobilisation en vue de prendre en charge ce patrimoine, de le restaurer. Un retour vers le passé, mais que l’on doit entreprendre selon les mêmes critères qu’à l’origine, sur de nouvelles bases où la modernité doit néanmoins être consultée et ne pas se contredire avec les valeurs culturelles du pays.
Fayçal Boukhtache : « Fusionner la musique du terroir avec la modernité, c’est possible !»
« Même si la chanson traditionnelle algérienne doit faire face à la rude concurrences des autres styles, elle reste présente dans pratiquement tous les foyers algériens. On est certes inondés par le flux de musiques et chansons locales et étrangères, mais l’algérien reste toujours à l’affût du style ancien, notamment chez les familles conservatrices. Comme le chaâbi, qui reste présent dans les 48 wilayas d’Algérie, le style le plus apprécié des amateurs de la chanson traditionnelle. Mais il y a aussi le wahrani, le malouf, le bedoui, le staïfi, l’andalou, et beaucoup d’autres expressions et formes musicales du cru. Et si je devais comparer ancien et nouveau, je dirais que même les textes musicaux modernes trouvent leurs racines dans la culture et les valeurs algériennes, y compris les mélodies inspirées et les poèmes »

« Je conseille aux jeunes artistes de laisser les textes tels qu’ils sont, et d’ajouter de nouvelles compositions musicales »
« A ce sujet justement, et dans le sens de partager ce patrimoine national avec les nouvelles générations, certains groupes reprennent d’anciennes chansons, ce que nous appelons la restauration. Notre patrimoine artistique reflète la vraie image du pays, c’est pour cela que je conseille aux jeunes artistes de laisser les textes tels qu’ils sont, et d’ajouter de nouvelles compositions musicales. Nous pouvons conjuguer la musique du terroir et la modernité dans un même produit, il suffit juste de garder le pilier tout en le modernisant »

Propos recueillis par Hamid Si Ahmed

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