Comme à l’accoutumée, cette 22ème édition du Festival du Monde Arabe de Montréal (FMA) ne manque pas d’originalité et d’ouverture sur des œuvres innovatrices, qui s’approprient le patrimoine pour jeter des passerelles de dialogue entre les différentes cultures.

C’est désormais un classique de ce festival, la soirée de l’enfant prodige de Constantine, Abbas Righi, affichait déjà complet depuis quelques jours. C’est donc dans un théâtre archicomble du Gesù, ce chef-d’œuvre architectural de style néo-baroque, que l’élève du cheikh Kaddour Darsouni ait retrouvé son public. Un public chaleureux, connaisseur et friand de belles choses. « Constantine en fête » est le titre de cette soirée qui célèbre le malouf, cette musique savante et racée, issue de la tradition musicale arabo-andalouse, dont la seule évocation nous renvoie aux jardins des délices d’une Andalousie, jadis, le creuset de la création artistique. Cette soirée a été introduite par la soprano, la diva du désert, Fairouz Oudjida, qui a été invitée par Abbas Righi pour partager la scène avec lui, dans un intermède surprise. Ce duo de charme, qui a chanté l’Algérie et l’exil, a enchanté les sens et les cœurs, et était « la cerise sur le sundae » (comme disent les Québécois) de la soirée !

Après un prélude instrumental et vocal (bacheraf et istikhbar) comme le veut le rituel dans la nouba constantinoise, Abbas Righi enchaine des pièces emblématiques du malouf selon les mouvements de la structure de cette musique savante et codifiée. Entre une mesure du luth et un flirt de l’archet avec les cordes du violon alto, le cœur frémit et l’âme s’extase, c’est la magie de cette musique aux vertus mystiques et exquises, qui chante la poésie et rien que la poésie! Pour le grand bonheur d’une charmante galerie, l’artiste de « la ville des ponts suspendus » a interprété magistralement les grands classiques du malouf chantant l’amour, la beauté de la bien-aimée, mais aussi la nostalgie, la séparation et les adieux.

Avec sa grande maitrise de l’univers poético-musical du malouf et sa voix exceptionnelle, étendue sur plusieurs octaves, le rossignol du Constantine transporte exquisément son public dans un torrent d’émotions, qui va crescendo jusqu’à la lisière de la transe ! C’est l’ambiance des grandes fêtes qui a régné ce soir au théâtre du Gesù, avec cette symbiose magique entre un artiste pourvoyeurs d’incantations et son public mélomane et fortement récepteur qui rend la pareille avec des ovations, des danses et des youyous !

La soirée « Constantine en fête » de cette 22ème édition du FMA a tenu toutes ses promesses, avec un récital magistral qui restera en mémoire, offert généreusement par un artiste au firmament de son talent, qui demeure l’un des gardiens de ce patrimoine musical ancestral !

Après cette soirée mémorable, Abbas Righi s’est livré à un intermède intime et à la bonne franquette avec son public qui souhaite le revoir plus souvent en terres d’Amérique, notamment à Montréal.

Sofiane Idir

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