La mémoire est devenu un sujet privilégie des sociétés post-conflit. C’est le cas du Chili après le 11 septembre 1973. Ce jour-là, le Président constitutionnel Salvador Allende fut renversé par un coup d’État. Dix-sept ans de dictature s’en sont suivis. Le pays doit guérir de ses blessures.
La mémoire collective doit être auscultée de très près afin de savoir que s’est-il réellement passé. Plusieurs films (No de Pablo Larraín, 2012) et documentaires (Nostalgie de la lumière de Patricio Guzmán, 2010) se sont penchés sur la question. Mais on a su peu ou prou ce que la parenté du Président Allende a vécu pendant ces années.
La mémoire est faite de souvenirs, mais aussi des silences et il devient difficile en effet d’apprendre davantage sur Allende, surtout si l’homme politique éclipse l’époux, le père, le grand-père.
Dans ce contexte, la réalisatrice Marcia Tambutti Allende, petite-fille du Président, a voulu répondre à une question toute simple : Comment la relation entre la famille et « El Chicho » (surnom affectueux donné à Allende) s’est-elle tissée ? Qui a été véritablement cet homme qui a dédié sa vie entière à la politique ?
Vie privée et vie publique s’entremêlent sans cesse, et c’est là tout le mérite de cet extraordinaire documentaire, car Marcia Tambutti réussit à faire la lumière sur plusieurs tabous familiaux, et ce, malgré le poids, parfois très lourd, de la politique dans leur vie. Par moments, le film prend en effet des allures de thérapie familiale. Et il le fallait bien afin de affronter la douleur et la souffrance. Comment Hortensia Bussi, dite La Tencha, femme d’Allende, a contribué à la carrière politique de son mari ? Qu’a-t-elle dû endurer ? Qu’a-t-elle dû taire ? Comment le suicide de leur fille, Tati, elle aussi dédiée corps et âme à la vie politique, a-t-il été vécu par sa mère? Comment le suicide d’Allende lui-même lors du putsch militaire a-t-il été pris par la parenté proche ? Comment comprendre un tel geste ? Ce film « libérateur » sait répondre à toutes ces questions.
Le matériel photographique mis à profit est un véritable bijou. Tout comme les images d’archive, qui sont tout-à-fait inédites. On voit ainsi un jeune Salvador Allende jouant une sorte de pièce de théâtre familiale. De toute évidence, un documentaire remarquable à voir absolument.
Allende mi abuelo Allende de Marcia Tambutti Allende ; Pays : Chili, Mexique ; Année : 2015 ; V.O. : espagnol ; Sous-titres : anglais.