Hiver 1922 au Québec. Un homme traverse à vive allure les bois enneigés sur un traîneau à chevaux. Quand soudain, le glacier craque et les eaux froides du lac engloutissent le traîneau, les chevaux et notre homme qui est miraculeusement secouru.
Trois jours plus tard, le jeune homme se réveille. Il se prénomme Daniel Letendre et il a la chance de pouvoir jouir de l’hospitalité d’Angus Mac Mahon propriétaire du Sheridan’s Mansion. Mac Mahon affirme vivre seul dans sa somptueuse demeure en compagnie de Mickhaï, le majordome au physique hors normes qui a sauvé Daniel. Étant donné que ce dernier a la jambe cassée, Mac Mahon lui prête un fauteuil roulant pour qu’il puisse se déplacer et le met en garde : « Voici le fauteuil qui appartenait à mon regretté frère, Zephan. Les araignées en ont fait leur royaume. Mais une fois nettoyé, il vous sera d’une grande utilité pour vous déplacer sur cet étage. Cependant, je vous déconseille fortement de vous aventurer dans l’aile ouest. Les planchers y sont vermoulus et attendent qu’un inconscient s’y risque pour s’effondrer » (p. 7).
À l’image de la femme de Barbe Bleue qui s’aventura à ouvrir la porte du cabinet qui lui était interdit, Daniel était lui aussi curieux de découvrir l’immense maison de Mac Mahon. Le jeune homme à l’esprit songeur devra confronter ses secrets avec ceux de Mac Mahon.
Dans une atmosphère sombre et propice aux questionnements, le scénariste Jacques Lamontagne nous invite dans un univers fantastique en développant chez les lecteurs cette envie d’en savoir plus. On retrouve ainsi, dans le premier épisode du diptyque Le Manoir Sheridan[1], plusieurs dimensions qui lui sont familières. L’auteur qui est Québécois de souche, ancre cette histoire qui se déroule au Québec dans un contexte proche de ses références culturelles.
D’abord, il met en œuvre cet exercice qui consiste à se rapprocher du réel et qui nous renvoi à sa série Wild West, où il passe en revue la vie de Calamity Jane et Wild Bill Hickok. Ensuite, il nous invite dans une aventure fantastique qui laisse penser qu’au pays de l’Érable, la magie n’est pas bien loin, à tel point, où on se dit que dans un pays tel que le Québec qui est connu pour ses grands espaces, une histoire pareille aurait très bien pu avoir eu lieu.
D’ailleurs, si on réussit à s’engouffrer dans l’histoire du Manoir Sheridan, c’est en grande partie grâce aux dessins de Ma Yi, qui signe délicatement aussi bien les traits des visages des personnages que les multiples détails qui évoquent le Québec d’antan. Il faut dire aussi que la collaboration entre Jacques Lamontagne et le bédéiste chinois, n’est pas nouvelle, puisqu’ils ont déjà réalisé ensemble la série fantastique Yuna qui a été publié aux Éditions Soleil.
Avec Le Manoir Sheridan, le duo nous invite dans une série fantastique et pleine de rebondissements.
Réda Benkoula
[1] Le Manoir Sheridan – Tome 1. La Porte de Géhenne | Jacques Lamontagne (Scénariste), Ma Yi (Dessinateur) | Vents D’Ouest | 2021 | 56 pages
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- Wild West. Wild Bill. Thierry Gloris et Jacques Lamontagne déconstruisent le Far West