Madagascar produit généralement une intense impression d’étrangeté. Plus qu’un voyage, une véritable expérience humaine, un envoûtement, une manière de vivre, de faire la fête avec la bière et une manière de mourir (deux enterrements espacés, avec Le retournement des morts en sus).
Déguster une série de brochettes de zébus face à un immense Baobab et voir voltiger les lémuriens sans y perdre le sens d’orientation, ni le goût de la joie de vivre n’est-il pas une délectation de nantis ?
De ce Musée naturel, régal pour les naturalistes, paradis touristique où la chaleur et les cocotiers sont bien là. Les paysages sont autant des cartes postales avec des noms qui s’étirent à couper le souffle, et pour l’exercice : Président actuel : Rajaonarimampianina, celui d’un ancien roi) : Andrianampoinimerina. Les Malgaches demeurent assez chatouilleux sur la prononciation des noms, une forme de civilité et de respect qu’il faudrait s’y conformer dans les protocoles.
Antananarivo
Au centre la capitale d’Antananarivo, Tana pour les intimes, se déversent quatre axes principaux des points cardinaux. La RN6, route goudronnée se dirige à 1200 km vers Diégo-Suarez (Antsiranana), la RN4 (600kms) vers Majunga (Mahajanga), la RN7 (900Kms) vers le sud sur Fort Dauphin (Taolagnaro), (piste poussiéreuse, infecte et plein d’épines d’un désert qui ne veut dire son nom), un paradis pour les 4×4 et enfin la RN5 qui s’étiole vers la côte de la vanille foisonnant de parcs nationaux où niche l’île Sainte-Marie (un autre site touristique en plein développement).
Le centre de la ville
Entourée de six collines sacrées, la ville niche au bas de la vallée, tout en grignotant sur les hauteurs. Le quartier s’articule autour de l’avenue de l’Indépendance, épicentre de la ville qui commence à la gare ferroviaire de Soarano et se termine à l’hôtel Glacier. Pour accéder à la ville haute, immanquablement, il faudrait couper par les escaliers d’Analakaley (160 marches). Tous les Vazaha (étrangers) l’empruntent. Tout au long, à chaque marche, un étal vous offre une variété de marchandise avec une majorité de Tampons-encreurs que vous pourrez faire réaliser à la demande. Cahin-caha, vous avalez cette volée de marche tout en maintenant le souffle et luttant contre les harcèlements des étalagistes. Et Dieu sait s’ils ne sont pas doués car si jamais, vous y prêtez attention ou proposez un prix si bas soit-il, vous êtes pris, suivi, harcelé, essoré, fatigué, et énervé ou bien acquéreur malgré soi.
Au pied des escaliers, les pavillons (vestiges du Zoma, l’immense marché à ciel ouvert qui se tenait jusqu’en 1997 le long de l’avenue, et dont le cinquième jour de la semaine (vendredi djoumoua se dit « Zoma » en malgache) était le point d’orgue, instauré sous le règne du roi. Les boutiques serrées, la gaudriole dans l’air, les gens gesticulent, se lancent des balivernes, la volonté de se dé coltiner de la pauvreté se manifeste ainsi. Une cogitation à hue et à dia ! Les pickpockets bien organisés, notamment des enfants avec un chapeau rôdent comme des vautours pour s’abattre sur le nouveau touriste visible à sa casquette immaculée et sa caméra en bandoulière. Les déconvenues du voyage s’ajoutent à la « tourista », aux arnaques du change mirobolant. On cherche une terrasse pour se souler de nouveaux paysages et se décanter des fortes émotions.
En plein centre on est frappé par une auguste architecture représentant la gare centrale. La gare de Soarano, classée patrimoine national, abrite un café luxueux et un restaurant prestigieux, des guichets, un quai désert qui lui manque…des passagers. Aucun service ferroviaire n’opère en effet depuis la capitale. Tribut colonial.
Réda Brixi