C’est dans son modeste appartement à Montréal, cloué à sa chaise roulante après un AVC, que le réalisateur, comédien et metteur en scène, André Brassard, nous restitue le film de sa vie dans un récit franc et bouleversant !

C’est la caméra du réalisateur Claude Fournier qui a extirpé ce monument du théâtre québécois de l’oubli pour lui accorder ses ultimes paroles. « C’est ma dernière prise de parole, c’est ce que je veux dire avant de partir » a-t-il dit. Ce besoin impérieux de dire des choses avant de tirer sa révérence est palpable dans le récit d’André Brassard qui, avec spontanéité, sincérité et brin d’humour, nous livre des fragments saisissants de son parcours prodigieux et de sa vie, marquée à jamais par une enfance houleuse ! Dans une approche privilégiant la proximité et une chronologie agrémentée de photos d’archive sur la vie et le parcours de l’artiste, le réalisateur et la productrice Marie-José Raymond, nous ont présenté un documentaire-porterait profond et réel d’Andrée Brassard.

D’un regard critique et d’une envie d’exhumer le tréfonds de ses pensées, André Brassard revient, avec des détails saisissants sur sa naissance indésirable et son enfance privée d’amour, la découverte de sa vocation et ses premiers pas dans le quatrième art, sa rencontre prometteuse avec le dramaturge Michel Tremblay qui allait révolutionner le théâtre québécois, sa carrière d’acteur et de réalisateur, et enfin son métier d’enseignant à l’École nationale de théâtre du Canada à Montréal. On découvre ainsi un artiste fier de ce qu’il a accompli, en se donnant corps et âme à ses passions, malgré des regrets qu’il a exprimés dans un sentiment de repentance pour se délier surtout de ses comportements marqués par l’ego et l’autodestruction ! Mais, aussi un homme qui a toujours vécu dans le sillage de la solitude qui le talonne depuis son enfance. Issu d’une relation hors mariage, André Brassard découvre en devenant adolescent que sa tante était sa mère auprès de laquelle il quémandait l’amour en catimini. Il se considère comme un enfant mal aimé, une déficience de l’enfance qui laisse un trou qui ne se referme jamais, tel un nid de poule impossible à colmater. J’ai un nid de poule sur le cœur, déclare-t-il tristement ! Ce détail saisissant est le moment le plus émouvant du film et nous livre une vraie leçon de vie !

Le réalisateur revient sur l’amitié profonde, mais pas toujours au beau fixe, d’André Brassard avec Michel Tremblay en dressant une passerelle de dialogue entre eux par un jeu de montage amusant ! Les deux amis se réconcilient et Michel Tremblay lui rend un vibrant hommage avec des mots laudatifs que Marie-José Raymond a partagés avec l’assistance avant la projection du film.

L’épilogue du film est déconcertante où on entend André Brassard dire « J’suis pas heureux de vivre, j’suis tanné; si la mort était un taxi, je l’appellerais », en tirant sa révérence avec les mots The end !

Sofiane Idir

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