Poesía sin fin fait suite à La danse de la réalité (2013). De l’enfance à Tocopilla, on se transporte en effet à Santiago, la capitale du Chili, où l’enfant deviendra un jeune homme plus affirmé, plus sûr de lui-même. Alejandro va découvrir le poète espagnol Federico García Lorca, qui le fait rêver de poésie. Il subira toutefois les foudres de son père. Aussi, les préjugés d’une société conservatrice pleuvront sur lui. La poésie n’est pas, selon le père, pour les hommes. Nous sommes devant un récit autobiographique où le conflit intérieur est mis de l’avant.
Il est certain que la présence d’un enfant dans un film nous amène dans l’émerveillement constant. C’était le cas précisément dans La danse de la réalité. À l’adolescence, l’émerveillement se perd petit à petit. On a aussi troqué la vie de cirque dans un petit village côtier par le gris d’un quartier ouvrier où pauvreté et délinquance se côtoient au quotidien ; c’est dans tous les cas le quartier dépeint par Jodorowsky dans Poesía sin fin.
La capacité d’émerveillement de l’enfant et le monde onirique s’éteignent, mais les recours pour les susciter de nouveau au moyen de l’art et de la poésie sont nombreux. Peine perdue. Jodorowsky ne réussit pas à nous captiver par l’histoire de ce poète centré sur lui-même. On pourrait dire à sa décharge que l’adolescence est un temps de quête identitaire et d’affirmation de soi pour ceux et celles qui trouvent leur voie, d’où le récit convergeant vers l’égocentrisme. Il reste qu’allégories et métaphores sont exagérées à outrance, tombant par moments dans une absurdité qui ne contribue en rien à la découverte de la poésie qui est supposée d’être incommensurable. Et pourtant, il rencontre des poètes et non pas les moindres, Nicanor Parra par exemple.
Poesía sin fin annonce un troisième épisode de cette autobiographie. Le poète part pour Paris afin de « sauver le surréalisme. » Nous souhaitons que le grand cinéaste et artiste polyvalent Alejandro Jodorowsky puisse cette fois reconquérir territoires et mots auxquels seule la poésie a accès.
Poesía sin fin d’Alejandro Jodorowsky ; fiction ; France/Chili ; Année : 2016 ; Version originale en espagnol avec sous-titres en français ; Durée : 128 min.
Poesía sin fin a été présenté en clôture du 8ème Festival du cinéma latino-américain de Montréal (FCLM) 2017. Cette année, le film argentin Camino a la Paz du réalisateur Francisco Varone a emporté le prix du public. Nous remercions les organisateurs du FCLM et nous disons : à l’année prochaine !