La réalité dépasse certainement la fiction. Mais la fiction peut aussi bien dépeindre la réalité.
Montréal est une plaque tournante pour la traite des femmes à des fins de prostitution. En avril dernier, la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) a démantelé un réseau criminel international de « souche asiatique ». Le réseau en question opérait principalement à Montréal et à Toronto et ses victimes provenaient de la Corée et de la Chine. Plus de 500 femmes furent dénombrées par le travail des policiers. La machine semblait bien rôdée : les jeunes femmes arrivaient au pays, elles étaient exploitées sexuellement, ensuite transportées dans une autre ville et, enfin, retournées à leur pays d’origine.
Anna est photo-journaliste. Elle suit la piste des jeunes femmes prostituées dans un pays asiatique. Elle les fait témoigner, prend des photos et prépare un reportage pour une revue. Elle a des contacts parmi les locaux et rencontre aussi Sam, un boxeur des combats clandestins. Sur le qui-vive constant, elle doit se faufiler tout le temps pour éviter d’être repérer par les mafieux. Les longues séquences fixes nous rendent prisonniers de ces moments d’angoisse.
Elle ne peut point échapper. « Vendue » par son contact au pays, Anna est kidnappée et séquestrée pendant des mois. Elle subit la torture et moult sévices qui cherchent à l’anéantir et à la taire. Elle se réveille à Montréal et apprend que Sam l’a acheté pour la sauver. Quoi faire? Se venger? Comprendre? Comment faire effectivement après avoir vécu dans sa propre chair ce qui était l’objet de son enquête?
Un événement marquant a amené le réalisateur Charles-Olivier Michaud à accoucher d’un film puissant en émotions. En étalant morceau par morceau cette cruauté humaine, Anna fait certainement preuve d’humanité, mais permet aussi de voir la rage transformée en leitmotiv pour avancer malgré la déchéance qui nous assiège.
Anna de Charles-Olivier Michaud; Long-métrage de fiction; Québec; Année: 2015 V.O.: français; Durée: 109 min.