« Un honneur pour moi d’être la tête d’affiche au Festival Opéra de Saint Eustache»

À l’issue de sa remarquable prestation lors du Concours international de chant Hans Gabor Belvedere en Autriche en 2019, le Baryton Hugo Laporte s’est frayé une place amplement méritée à La Scala de Milan, célèbre théâtre d’opéra italien de renommée internationale. Synonyme d’une carrière en pleine expansion, la prochaine participation de Mr. Laporte à l’institution milanaise légendaire en 2023 sera l’occasion pour lui de travailler avec les plus grands artistes de notre temps.

Déjà célèbre sur les grandes scènes québécoises et depuis plusieurs années tête d’affiche au FestivalOpéra des Grandes Laurentides, Hugo Laporte pourra confirmer à la Scala en 2023 toute cette belle renommée qu’il s’est forgé à travers sa voix unique et sa passion pour l’art lyrique.

Dans cette seconde partie de notre entretien, notre invité en podcast s’est confié à L’initiative sur son étroite collaboration avec l’agence LM Opéra, ses projets et ses passions. Alors que le monde du spectacle continu de souffrir face à la crise sanitaire, il nous explique à cœur ouvert à quel point cette situation a créé un désarroi total chez les artistes et les professionnels de la scène.

Écoutons-le !

Vous avez participé à des concerts virtuels organisés par votre agent et Soprano Leïla-Marie Chalfoun au mois de juillet et septembre dernier. Parlez-nous de cette relation avec Mme. Chalfoun et de ces concerts…

« Je pense que Leïla Chalfoun est la personne que je connais qui a le plus de volonté »

Cela fait plusieurs années que nous développons cette relation avec madame Chalfoun. Cela a commencé juste avant que je remporte un grand concours, elle est devenue mon agent juste au moment où j’en avais besoin. J’avais des appels pour négocier des contrats, puis elle était là pour ça. C’est bien tombé pour elle aussi évidemment, puisqu’un artiste qui vient de gagner un grand concours, c’était bien aussi pour son agence. Leïla n’est pas uniquement agent, puisqu’elle est aussi directrice générale au Festival Opéra de Saint Eustache des Grandes Laurentides. C’est une femme remplie d’idée, comment dire, pleine de volonté. Je pense que c’est la personne qui a le plus de volonté que je connaisse sur cette planète.

Depuis le début de la pandémie, à chaque fois qu’elle m’appelait, elle me disait de ne pas m’inquiéter et que ça allait s’arranger, qu’elle avait plein de projets. Elle est vraiment incroyable ! Elle est vraiment épatante ! La relation que j’ai avec elle me permet d’être très présent au Festival, depuis six ans je crois, je suis la tête d’affiche et c’est pour moi un honneur ! Sinon, concernant les concerts qu’on a fait cet été, c’était très sympathique. En raison de la pandémie, Leïla a donc décidé de faire des concerts-barbecues, dans le jardin du Festival, où elle m’a invitée à plusieurs d’entre eux, c’était vraiment bien.

Le premier, c’était avec mes deux amis, Suzanne Taffot et Michel-Alexandre Broekaert, ce fût de belles retrouvailles, mon premier projet depuis le début de la pandémie. Ca m’a fait beaucoup de bien de retrouver des amis musiciens. Le concert suivant, c’était avec Luc Beauséjour et son Ensemble Clavecin en concert. Luc est un des plus grands musiciens au Québec, donc c’est toujours un honneur de travailler avec lui. Une belle opportunité que Leïla nous adonné à Luc et moi.

Pourriez-vous nous dire quelles sont les difficultés et les obstacles que vous avez dû affronter depuis vos premiers pas dans le monde de la scène ?

« Il ne suffit pas de signer des contrats et d’aller chanter, Il faut toujours que je me remette en doute » « Le fait d’avoir gagné une renommée m’a forcé à travailler encore plus » « J’ai hâte de travailler avec les musiciens et les artistes de la Scala, les plus grands de l’époque ! » « Mon but ce n’est pas d’aller sur des grandes scènes, ce n’est pas la gloire, mais faire de la belle musique »

Des petits et moyens obstacles, on en a constamment, y’en a même qui vivent de gros obstacles. Pour ma part j’ai été chanceux de pouvoir éviter les gros obstacles. Je dirais que les obstacles majeurs que j’ai eu, c’était à la fois mes plus grandes réussites.

Avant les concours, je n’étais pas vraiment connu en dehors de ma région, et tout d’un coup je gagne deux concours important au Canada et les gens se mettent à parler de moi. Certains ont appelé Leïla pour me proposer des contrats, j’avais 23 ans et peu d’expérience des grandes scènes. C’était un gros défit parce qu’on avait de grandes attentes et ça m’obligeait à travailler très fort. Non seulement pour être au niveau, mais parce que le chant, c’est toujours une question de se remettre en question, constamment. Il faut toujours développer la voix, développer l’instrument, développer la technique.

Avec l’âge, la voix se développe, ça c’est un gros défi. Il ne suffit pas de signer des contrats et d’aller chanter, Il faut toujours que je me remette en doute à tous instants avec mes professeurs, que je leur dise est ce que ma voix est correcte. Il faut trouver le temps de pratiquer, même quand on a trois à quatre concerts par semaine. Je dois donc développer ma voix pas juste pour qu’elle reste belle mais aussi pour qu’elle s’améliore. Encore aujourd’hui j’ai des cours, deux fois par mois en général, des fois plus, des fois moins.

Le fait d’avoir gagné une renommée m’a forcé à travailler encore plus et à mettre les bouchées doubles. Je peux vous garantir avec certitude que je n’aurais jamais eue le niveau que j’ai aujourd’hui si je n’avais pas eu autant de succès, je pense qu’avec le succès il y a des risques de perdre la qualité si on ne fait pas attention. J’ai parcourus énormément de chemin depuis ces jours où j’ai gagné des concours.

Parlez-nous de vos objectifs et de vos ambitions…

Mes objectifs et mes ambitions sont principalement liées à la musique et au chant, ni à la renommée, ni à l’argent, ni à des rêves fous, ou à quoi que ce soit, comme chanter tel rôle sur telle scène, on m’a souvent posé la question par es journalistes, ma réponse a toujours été que je veux être où se trouve la belle musique, là où il y a tellement de richesse. On me dit souvent que je suis chanceux de voyager, mais en réalité ce n’est pas vraiment ma passion. Mon but ce n’est pas d’aller sur des grandes scènes, mes ambitions, ce n’est pas la gloire, mais faire de la belle musique. A chaque fois que je travaille une œuvre, je deviens de plus en plus exigeant dans cette œuvre, toujours la peaufiner et l’approfondir, découvrir de nouvelle connaissance et relations avec de nouvelles personnes. Finalement c’est un effet secondaire que de voyager et d’être reconnu. Ma passion pour la voix et le coté lyrique pourraient m’amener un jour vers l’enseignement par exemple.

« Une bonne partie des gens qui ont réalisé de grandes choses dans leur vie ont réussi à suivre leur rêves parce qu’ils n’ont pas écouté les gens qui les ont découragé »

Revenons à la Scala de Milan. Dans quel état d’esprit préparez-vous ce grand rendez-vous ?

D’abord je suis très heureux parce que je sais que ça va me pousser à travailler très fort et à me surpasser, c’est quelque chose que j’attends avec impatiente. Les mois qui précèdent cet engagement là seront très riches en apprentissage et remise en question, parce qu’il faut que j’arrive là bas avec un esprit ouvert.

Arriver là bas en ayant imaginé toutes les possibilités de mise en scène, vocale, musicale, il faut vraiment avoir travaillé toutes sortes de façons. Finalement, ce qui me plaît beaucoup dans cette aventure là, ce sont les mois qui précéderont et les semaines qui seront encore plus intenses, et surtout que là bas, les attentes seront extrêmement hautes. J’y arriverais certainement avec un certain stress, je ne peux pas le cacher, mais je vais essayer d’être le plus libre possible au niveau artistique, être capable de m’exprimer, sans que le stress entre en conflit. J’ai hâte de travailler avec les musiciens et les artistes de la Scala, parmi les plus grands de l’époque !

 

 « En raison de la pandémie, beaucoup d’artiste qui représentent la relève vont tout simplement arrêter pour faire autre chose, une perte pour la richesse culturelle »

 

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Plusieurs concerts ont été annulés et les salles de spectacle ont dû fermer au Québec. Que ressentez-vous et à quel point les artistes souffrent-ils de cette situation ?

Plusieurs concerts ont été annulés et les salles de spectacle ont dû fermer au Québec. Que ressentez-vous et à quel point les artistes souffrent-ils de cette situation ?

C’est sûr que c’est une situation très grave, il ne faut pas le nier. Les artistes sont déjà dans une situation précaire pour une très grande majorité. Même quand tout va bien, même quand le gouvernement donne ses bourses habituelles, quand l’économie va très bien, quatre vingt quinze pour cent des artistes sont dans une situation précaire au niveau financier. Certains font d’autres professions en même temps, mais comme artiste à temps plein, c’est très difficile. Beaucoup d’artiste qui représentent la relève et qui veulent percer vont tout simplement arrêter pour faire autre chose, en raison de la pandémie, c’est certain.

Donc c’est dommage parce qu’on va perdre une richesse liée à la culture, liée à la personnalité de chacun, ces personnes qui peuvent apporter quelque chose d’important dans le domaine. Les impacts sont dur à mesurer, puis évidemment pour les salles de concert, les plus touchés seront bien évidemment les artistes, les interprètes, voir les metteurs en scène et les artisans de la scène, et les techniciens.

Si je dois arrêter le chant, j’aimerais prendre cette décision de mon plein gré et qu’elle ne me soit pas imposée. Ce ne serait pas une tristesse et je n’aurais aucun problème avec ça. Il y a des gens sous la pression économique et psychologique, le fait de ne plus pouvoir pratiquer ce qui nus passionne, c’est très dure.

Je ne dirais pas aux gens du gouvernement de rouvrir les salles comme ça sans réfléchir, ça ne serait pas non plus une bonne idée. Mais si je parle du cas du Québec en particulier, on a ouvert les salles de concert pendant quelques semaines au début de l’automne et tout s’est bien passé. Il n’y a eu aucun cas de transmission enregistrés, dans les salles de concert, après ils ont décidé de tout fermer, ce que je n’arrive pas à comprendre. Pourquoi c’est interdit ?

Si vous aviez des conseils à donner aux jeunes québécois et canadiens qui se sont lancé dans l’opéra, quels seraient-ils ?

Je dirais qu’il ne pas faut juste le faire pour soi et ne pas le faire juste pour les autres. Si vous voulez faire de l’opéra, faites-le, puis ne vous laissez pas dire que ce n’est pas un métier, que ce n’est pas possible. Moi-même je me disais que ce n’étais pas possible, mais il ya eu des gens qui m’ont dis que j’étais capable de le faire. C’est un peu cliché de dire suivez vos rêves, mais il y a du vrai là dedans. Une bonne partie des gens qui ont réalisé de grandes choses dans leur vie ont réussi à suivre leur rêves parce qu’ils n’ont pas écouté les gens qui les ont découragé. Il faut écouter ceux qui vous encouragent. Les autres, il vaut mieux les ignorer et leur prouver après plusieurs années qu’ils avaient tort.

Un message à transmettre à vos admirateurs ?

Je m’ennuie vraiment de mon public. Avant je faisais ça par passion, maintenant c’est pour mon public. Cher public, je t’aime et j’ai hâte de te retrouver, parce que c’est toi qui me fais vibrer. Je suis capable de faire de la musique tout seul, mais avec mon public c’est complètement autre chose. Je pense que tous mes collègues seraient d’accord pour dire la même chose. Même si pour vous les concerts virtuels, ne sont pas aussi intéressants que des concerts en public, je suis tout à fait d’accord avec vous. Merci de nous encourager car maintenant c’est la seule façon de pratiquer notre art. Merci de nous soutenir dans ces épreuves.

Propos recueillis par Hamid Si Ahmed

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