Houba houba houba. Vous avez reconnu ce cri ? C’est bien lui…C’est celui du marsupilami, l’animal qui a été créé par Franquin en 1952 dans Spirou et Fantasio avant d’avoir sa propre série à partir de 1987.
Le marsupilami, cet animal étrange au poil jaune et tacheté de noir nous fait rire et nous interpelle avec sa queue interminable qui mesure dit-on huit mètres. Il vit dans l’État fictif de la Palombie quelque part en Amazonie et s’il a toujours évolué dans un univers imaginaire, le revoici qu’il apparaît telle une légende venue du plus profond de nulle part pour perturber le quotidien de François, un jeune gamin bruxellois qui a le chic de recueillir des animaux en détresse.
On l’aura compris, cette histoire du marsupilami n’a rien à voir avec celles auxquelles on s’est habitué. Avec un titre évocateur tel que La bête[1], on se rend compte que nous sommes à des lustres du mignon tout plein marsupilami qui, rappelons-le, a fait l’objet d’une série télévisée et d’un long-métrage signé Alain Chabat en 2012.
On peut le dire Frank Pé et Zidrou nous font découvrir l’animal comme on ne l’a jamais vu !
Un rapide coup d’œil au réalisme du dessin de la couverture du livre, permet de comprendre que l’œuvre rend hommage à cette bête que l’on connaît si peu. En optant pour un style graphique plus réaliste, les deux auteurs nous font remonter le temps vers les années 1950 pour créer un univers qui nous permet d’en apprendre plus sur les origines du marsupilami. La bête qui est loin d’être facile à apprivoiser, est capturée par des braconniers et expédiée dans une cage à bord d’un navire, avec d’autres animaux exotiques en Belgique. Les conditions du transport sont terribles et l’animal qui est totalement épuisé réussi à faire faux bond à ses geôliers.
Il est recueilli par le jeune François qui nourrit cette passion de rassembler chez lui les animaux blessés. Lui qui est tout le temps harcelé et mal traité par ses camarades de classe, trouve la force d’aider des bêtes.
En cette époque de l’après-guerre, la mère de François subit la méprise et les qu’en-dira-t-on de son voisinage. Elle est rejetée de toutes parts et l’amour qu’elle porte à son fils comble la vie de misère qu’elle doit subir au quotidien. Malheureusement, la quiétude de cette mère monoparentale est perturbée par l’arrivée du marsupilami…
La bête est une œuvre en deux tomes, dont on découvre ce premier volume qui vient d’être publié aux éditions Dupuis. Graphiquement attrayante avec un format hors-norme de 156 pages, l’œuvre plaira aux fans et aux amateurs de suspense et d’aventure, car elle rompt avec les traditionnelles aventures humoristiques du marsupilami, puisque l’on découvre ici une histoire à la fois sombre, touchante et authentique d’un animal sauvage dont on ignore tout. D’ailleurs comme on peut le lire dans l’ouvrage, on le compare à un singe et à un félin.
Avec La bête, on s’imprègnera d’une nouvelle histoire du marsupilami qui est imaginée par Zidrou, lui qui connaît que trop bien l’univers de Spirou pour avoir collaboré avec Frank Pé dans La Lumière de Bornéo en 2016, nous permet d’explorer cette réécriture de l’histoire du marsupilami.
Le très prolifique Benoît Drousie alias Zidrou qui a déjà signé les scénarios de plusieurs séries dont Les Beaux Étés, La peau de l’ours et plus récemment celui de Léonard, s’associe à Frank Pé qui dispose d’un certain talent pour les œuvres réalistes et le monde animal comme on a pu le voir dans Little Nemo et la série Zoo.
Graphiquement parlant, La bête est un sans-faute, qui interpelle par la qualité de ses planches et la foultitude de détails qui nous immergent pleinement dans une époque pas si lointaine mais ô combien difficile. L’œuvre est non seulement à découvrir, mais à lire et à relire.
Réda Benkoula
[1] La bête T.1 | Scénario : Zidrou, Dessin : Frank Pé | Dupuis, Collection : Le Marsupilami | 2020 | 156 pages.
