Fred Neidhardt et Fabrice Tarrin viennent de publier aux Éditions Dupuis un nouvel album des aventures de Spirou qui vient enrichir cette mythique série qui a accompagné plusieurs générations de lecteurs. Créée en 1938 par Jean Dupuis et Rob-Vel, le célèbre groom a traversé les décennies sous la plume de plusieurs auteurs qui ont apporté à leur manière « La touche » qui a fait le succès de cette bande dessinée.

Ce nouvel album qui s’intitule Spirou chez les Soviets[1], est avant tout l’œuvre de deux fans du célèbre aventurier et qui avouent avoir fait de leur mieux pour plaire aux lecteurs et bien entendu rendre hommage au personnage.

Citations :

  • « Je suis tombé dans la marmite quand j’étais petit…Ensuite mon père m’a abonné [Ndlr : au magazine Spirou] » – Fred Neidhardt.
  • « Depuis l’enfance, les récits de Franquin avec Zorglub ou encore Le Nid des marsupilamis m’ont toujours fasciné. Adolescent, j’aimais tellement Franquin que je me suis détourné des autres auteurs de BD » – Fabrice Tarrin

Les auteurs ont repris les ingrédients de la série des années 50 et 60 et y ont ajouté du réalisme et un soupçon de touche moderne. Pour ce faire, ils ont choisi d’embarquer Spirou et Fantasio dans une aventure vers la Russie où le danger et l’intrigue sont présents à chaque page. D’ailleurs ce n’est pas la première fois que les deux acolytes vivent des aventures dans ce pays, puisqu’ils ont visité la capitale du Kremlin dans l’album numéro 42 et qui était signé par Tome et Janry. Nos héros ont sillonné Moscou sur fond de complot et de lutte qui opposait la mafia russe et les services secrets du KGB dans l’ex-URSS.

L’album Spirou chez les Soviets nous transporte donc quelque part au début des années 60, au moment où la guerre froide était à son summum entre le bloc de l’Est et le bloc de l’Ouest (la crise des missiles à Cuba, la construction du Mur de Berlin, la crise autour du chasseur américain U2, la course à l’armement, la conquête de l’espace). Cette quête du contrôle pour l’expansion du communisme et le point de départ de cet album puisque les auteurs ont pris soin de faire des recherches historiques pour ancrer Spirou et Fantasio dans une époque sans les déconnecter des codes de la BD.

On retrouve ainsi les talents d’enquêteurs et d’aventuriers des deux héros qui prennent l’avion pour se rendre chez les Soviets. Ah les Soviets ! Du point de vue du bloc de l’Est, ils étaient des alliés incontournables face à l’impérialisme américain. Ils étaient aussi les amis des pays nouvellement indépendants. Par contre, ils représentaient un danger du point de vue du bloc de l’Ouest, car leur idéologie se basait sur la pensée unique du Parti Communiste et ils étaient réputés pour se débarrasser de leurs opposants ou de les interner dans les camps du Goulag.

Cette mise en contexte historique est importante pour comprendre la trame de cet album qui nous invite de manière subtile à vivre une aventure de Spirou tout en apprenant un peu plus sur l’histoire sans pour autant être perdu comme le confirme Fabrice Tarrin qui cite : « On ne voulait pas que le lecteur puisse lire l’album sans qu’il lui soit nécessaire de saisir toutes les références. Si on les connait tant mieux, sinon ce n’est pas grave. Il faut rester accessible au plus grand nombre ».

Ainsi donc, dès les premières pages de l’album, on comprend que le danger rôde autour du château du comte de Champignac. Le comte a disparu. Il a été enlevé par les agents du KGB pour l’obliger à aider le savant russe Trofim Lyssenko à propager le gène du communisme. Spirou et Fantasio doivent sauver leur ami et contrecarrer les plans machiavéliques du savant fou qui, on l’aura compris, a véritablement existé.

Les bédéistes qui ont fait un excellent travail de référencement et de recherche s’amusent à multiplier çà et là les clins d’œil à l’histoire en mettant en scène plusieurs personnalités telles que John Edgar Hoover le patron du FBI qui était réputé pour faire la chasse aux communistes (p.33), ou encore le premier secrétaire du Parti communiste, j’ai nommé Nikita Khrouchtchev (p.45). L’ambiance « jamesbondienne » est présente dans la bande dessinée qui récupère les codes de l’agent 007 et ceux de la série Mission Impossible pour voler à la rescousse du comte de Champignac. Les lecteurs peuvent ainsi s’amuser à repérer tout au long de l’œuvre les références à l’histoire ou au monde de la BD (Pif, Gaston Lagaffe, Tintin, Dupuis). On notera enfin que pour les besoins de cette aventure, les auteurs ont choisi d’inverser les lettres « N » et « R » comme pour simuler l’accent russe même si celles-ci en russe se prononcent respectivement « i » et « ja ».

Les lecteurs pourront se délecter à vivre les aventures de Spirou et Fantasio qui rencontrent encore une fois des personnages hauts en couleur.

Reda Benkoula 

[1] Les aventures de Spirou et Fantasio. Spirou chez les Soviets | Fred Neidhardt, Fabrice Tarrin | Dupuis | 2020 | 56 pages

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