Pluie de sueurs (3ark el chta) est un hymne à l’amour dans sa forme la plus authentique à travers le regard que transcrit Hakim Belabbes dans ce long-métrage.
L’histoire que raconte Hakim Belabbes dans le film est inspirée d’une rencontre qu’il avait fait, il y a de cela 17 ans dans son village natal de Bejaâd au Maroc. L’homme qu’il rencontra était vêtu d’une vielle djellaba transparente et venait de sortir de l’hôpital. Il lui confia avoir perdu sa femme et ses enfants après avoir été dépossédé de ses biens.
Tel que le confiait le réalisateur, l’absence de dignité qui caractérisait cette situation l’a profondément marqué à une période de sa vie où lui-même passait par une période de déprime.
Cet évènement marquant a finalement pris forme à travers une œuvre cinématographique touchante qui s’attarde sur la vie d’une famille de fermiers qui doit affronter les difficultés de la vie alors que tous les espoirs leurs sont enlevés.
Mbarek et son épouse vivent sur une terre qui se meurt. Mbarek veut à tout prix conserver la terre de ses ancêtres alors que plus rien ne pousse dessus. Les puits d’eau se sont asséchés et il croule sous les dettes d’une banque qui veut lui saisir ses biens et un entourage qui lui conseille de tout lâcher.
La fierté de cet homme de famille est ancrée en lui et il s’acharne à creuser des trous à bout de bras dans l’espoir de trouver de l’eau. Il pioche inlassablement la terre et se renferme sur lui-même. Amine Ennaji interprète le personnage de Mbarek qui porte un regard dur sur la vie. Il ne veut pas renoncer devant la responsabilité de prendre soin sa famille et de son père à moitié fou. Son fils Ayoub est interprété par Ayoub Khalfaoui, un acteur trisomique qui réussit à toucher les spectateurs à travers la sincérité de son rôle. Fatima Zahra Banacer interprète quant à elle le rôle de Ayda l’épouse de Mbarek.
Le jeune Ayoub est le malheur du père et la bénédiction de la mère qui tente tant bien que mal d’épauler un homme assombri par la vie.
D’ailleurs, on a l’impression que tous les malheurs du monde s’abattent sur cette famille puisque la malchance s’acharne sur ses membres. L’infortune est le quotidien de ces paysans dans ce Maroc profond qui semble figé dans le temps.
Hakim Belabbes qui a travaillé sur le tournage du film pendant trois semaines avouait que de nombreuses scènes avaient été supprimées ou modifiées. Une part d’improvisation caractérise le film puisque le réalisateur ne pouvait diriger le jeune Ayoub qui est attient de trisomie. C’est d’ailleurs le point fort de ce long-métrage qui s’est construit naturellement à travers le jeu authentique des personnages, ce qui lui a valu d’abord d’être projeté au 33e festival International du cinéma Vues d’Afrique et de remporter en plus le Prix du Meilleur long métrage.
Réda Benkoula