Frappée de plein fouet par la pandémie de COVID-19 et le krach des prix du pétrole, l’économie canadienne entre, désormais, en récession, affirme l’Institut C.D. Howe (think tank économique et social, établi à Toronto) au début de mai 2020. En économie, le terme récession renvoie à une baisse significative touchant l’ensemble de l’économie pendant au moins deux trimestres consécutifs, qui affecte les grands agrégats économiques : production, revenu, emploi, consommation…

Selon les données de la Statistique Canada, et les prévisions de la Banque de développement du Canada (BDC), l’économie du pays connaitrait deux fléchissements consécutifs lors des deux premiers trimestres de l’année. Après s’être contracté de 2,6% pendant le premier trimestre (estimation approximative), le PIB canadien subirait une baisse de 11% au deuxième trimestre, selon les prévisions de la Banque de développement du Canada (BDC). Selon une note de conjoncture publiée par la Banque Nationale en avril dernier, la contraction du PIB de l’économie canadienne pour l’année 2020 pourrait atteindre 4,8%. Le repli économique constaté depuis mi-mars est généralisé touchant plusieurs industries. Les secteurs les plus affectés par les mesures de confinement sont le tourisme, le transport, la restauration et les services personnels. Cependant, quelques secteurs résistent à cette récession en enregistrant une croissance à l’image de la distribution alimentaire et de la vente en ligne. Les données de Statistique Canada montrent que l’économie du pays a perdu un million d’emplois en mars (dont 264 000 emplois au Québec), ce qui porte le taux de chômage à 7,8%. Cette perte considérable d’emplois vient de mettre fin à une embellie de gains d’emplois qui a duré plus de trois ans. En ce contexte de récession, quelles sont les mesures prises par les gouvernements pour amortir les effets de cette crise ? Et cette récession est-elle durable dans le temps ?

Des mesures monétaires et budgétaires exceptionnelles

Afin d’amortir les effets du repli économique occasionné par la pandémie COVID-19, les gouvernements fédéraux et provinciaux ainsi que la Banque du Canada ont pris des mesures exceptionnelles dans le cadre de leurs politiques monétaires et budgétaires. Pour soutenir l’activité économique et maintenir l’inflation à un niveau bas et stable, la Banque du Canada a décidé d’abaisser son taux directeur trois fois en l’espace d’un mois pour l’établir à 0.25%. Un ajustement visant à maintenir le bon fonctionnement du système financier et à faciliter l’accès au crédit. Afin que les principaux marchés financiers continuent de fonctionner convenablement, la Banque du Canada a mis en place plusieurs programmes d’achat massif d’actifs, notamment les obligations du gouvernement du Canada, pour accroitre la liquidité des marchés. De son côté, le gouvernement fédéral a mis en place un plan d’intervention économique pour faire face à la contraction de l’économie et soutenir tant les particuliers que les entreprises via une série de mesures (allocations directes, subventions salariales, prêts sans intérêts, report d’impôts…). Parmi les mesures de ce plan, on cite la prestation canadienne d’urgence (2000$ par mois durant un maximum de quatre mois pour les travailleurs ayant perdu leur emploi à cause de la COVID-19), qui coûterait 35,5 milliards $; la subvention salariale d’urgence (vise à aider les entreprises lésées par la pandémie pour payer leurs employés, pouvant atteindre un maximum de 847 $ par travailleur par semaine, qui devrait coûter 73 milliards $… Ce plan d’intervention coûterait plus de 200 milliards $ au Trésor Public, ce qui pousserait le déficit budgétaire à 252 milliards $ au terme de l’exercice 2020-21, selon les prévisions du Directeur parlementaire du budget, Yves Giroux.

Une récession passagère ou durable ?

La récession qui frappe le Canada pourrait-elle durer dans le temps et se transformer en « Great Recession » (terme utilisé dans le monde anglophone pour désigner la crise de 2008), voire en une grande dépression (elle qualifie une grave et longue crise économique comme celle qui toucha l’économie mondiale dans les années 1930)?

La réponse à cette question dépend de l’efficacité des efforts consentis pour contrecarrer la propagation du coronavirus, mais également des facteurs qui découlent de l’économie canadienne et mondiale: comportements des entreprise et des consommateurs (investissements, faillites, baromètre du moral, niveau d’endettement des ménages…), reprise des prix du pétrole (secteur pétrolier compte 8% du PIB canadien), reprise des exportations de biens et services (36% du PIB canadien), compétitivité internationale du Canada (elle dépend de la productivité des entreprises et la valeur du dollar canadien).

Selon un sondage réalisé par Newcom Média Québec auprès des analystes financiers agréés (CFA) membres de CFA Montréal, 60% d’entre eux croient que la récession actuelle durera moins d’une année au Canada. La Banque du Canada se dit inquiète des effets de la pandémie sur l’économie du pays si les mesures de restrictions ne sont pas levées progressivement d’ici l’été. Dans le cas échéant, le repli économique causé par la COVID-19 pourrait être le pire de l’histoire, prévoit cette institution !

Sofiane Idir

Read previous post:
Stratégies en emploi : S’adapter au télétravail

Quand on a passé plusieurs mois, voire plusieurs années à se rendre au bureau quotidiennement, il peut être difficile de...

Close