Alors que les étudiant•e•s subissent de plein fouet l’inflation et la crise du logement, l’indexation des frais de scolarité n’a plus sa place comme mode de financement de nos universités. Telle est la conclusion que tire l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) dans une étude parue aujourd’hui. Plutôt que de faire porter une part croissante du coût de l’éducation sur les ménages déjà très endettés, le gouvernement devrait profiter de la hausse de ses revenus pour introduire la gratuité scolaire comme l’ont fait bon nombre de pays sociaux-démocrates.

Seulement 1,2 milliard de dollars pour la gratuité au Québec
Selon l’étude publiée aujourd’hui, la gratuité scolaire au Québec coûterait 1,2 milliard de dollars, ce qui représente moins de 0,9% des dépenses totales du budget du Québec. « Non seulement la gratuité scolaire est financièrement viable, mais c’est très peu cher payé pour éviter les nombreux ratés du modèle néolibéral. En effet, des frais élevés et la perspective de s’endetter exercent un effet d’aversion qui décourage les futurs étudiant•e•s à poursuivre leurs études, surtout les moins nanti•e•s. Parallèlement, la nécessité de rembourser leurs dettes peut en conduire plusieurs à privilégier des emplois où les revenus sont les plus élevés, sans égard à leur utilité sociale véritable », soutient Samuel-Élie Lesage, chercheur associé à l’IRIS et co-auteur de la note.

Gratuité scolaire : la norme pour plusieurs pays
Historiquement, c’est la gratuité scolaire ou la quasi-gratuité (frais modiques) qui demeure la norme dans les États sociaux-démocrates. Pensons notamment à la France, au Danemark, à la Finlande, à la Norvège, à la Suède, à l’Islande, à l’Argentine, au Brésil et à l’Uruguay. L’introduction de frais de scolarité et d’un endettement étudiant élevé, selon le modèle anglo-saxon, est par conséquent la réelle nouveauté dans l’histoire des sociales-démocraties. Par exemple, alors que la gratuité de l’enseignement supérieur fut le modèle de financement privilégié des années 1960 à 1980 au Royaume-Uni, les établissements d’enseignement de ce pays ont enregistré la plus forte hausse de la part privée du financement au cours de la dernière décennie.
« Il faut rompre avec la croyance largement diffusée dans le discours public selon laquelle l’indexation est un ‘’compromis raisonnable’’ ; inversement, l’abolition des frais de scolarité n’est pas une utopie portée par quelques étudiant•e•s, mais la solution désignée par bon nombre d’États – comme l’Allemagne en 2013 – pour contrer la précarité financière des personnes aux études. Rappelons qu’aux État-Unis, les frais de scolarité ont augmenté d’environ 500 % depuis 1985, alors que la dette étudiante totale avoisine aujourd’hui les 1 700 milliards de dollars », indique Éric Martin, chercheur associé à l’IRIS et co-auteur de la note.

Quelles finalités pour l’enseignement supérieur ?
« La solution ne se limite pas simplement à imiter les pays scandinaves. Il est temps d’amorcer un questionnement plus large sur la logique croissanciste à laquelle sont assujetties nos universités aujourd’hui. Ces dernières, véritables puits sans fonds, n’ont pas besoin qu’on y injecte toujours davantage de ressources pour faire face à la concurrence internationale. Cette conception, en plus de favoriser une croissance des activités de recherche dommageables pour l’environnement, sert à son tour à légitimer la hausse des frais de scolarité sous prétexte de sous-financement », conclut Éric Martin.

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