Entre le bien-être et la douleur, la joie et la tristesse, il n’y a parfois qu’un pas à franchir, le temps d’un soupire, tant la vie est pleines de sentiments égarés et désemparés, qui peuvent chavirer d’une rive à l’autre. Vivre avec ce sentiment de remords et de désespoir peut parfois donner sens à une vie, expliquer pourquoi s’affronter soi-même peut aussi être une raison d’être. Telle est cette magie de la poésie que nous raconte le recueil « Hélas ! », dans toutes ses facettes, dont l’auteur Meb Rock ne s’en cache pas de cette force des mots qui bouleverse, qui manipule et qui nous fait rêver.

Nous accordons que la vie est ainsi faite, mosaïquée par les différentes forces de la nature et des hommes, ou parfois l’esprit se perd dans les profondeurs du doute et du vide. Un vide dont se nourrit l’auteur pour exprimer les limites de ses espoirs et de ses croyances, avec cette mélancolie éternelle qui même en temps de joie, nous colle à la peau. Le récit de Meb Rock retrace une vie réelle monotone, sous l’emprise des caprices et des rêveries, mais qui se voit toujours ensorcelé par ce sentiment de rejet, de se plaire à vouloir caresser la solitude et l’inquiétude. Quand les regrets disparaissent, la passion les remplace… »

Au début de l’ouvrage, les poèmes « L’éden du poète », « Sentiment du poète », « Ô Muse ! », « Beau poème », « Disciple de la vie », ou « L’aube ! », nous ouvre déjà les portes de la solitude, de le peur et de la tristesse. Et d’enchaîner au milieu du recueil avec « Ma solitude », « L’isolement », « Perdition », « Détresse », « Joute avec la mort », ou bien « L’angoisse », ou l’on ressent vraiment chez l’auteur cette mélancolie éternelle qui témoigne d’une manière de penser et de décrire la vie aux limites du désespoir. Meb Rock ne nous prive pas néanmoins de jolis passage plaisant et amusants, comme « Les vapeurs du vin », « Chère madame », « La merveille », ou « Mon cœur rêvait », avec cette lueur d’espoir qui apparaît parfois comme des clichés enfouis dans son subconscient, comme pour rappeler que ce n’est après tout, qu’une manière de penser, que l’amour des mots exprime.

Le récit d’un passionné à la plume déchirée

Parlez-nous de l’auteur, qui est Meb Rock ?

Meb Rock est un écrivain, poète algérien d’expression française. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages littéraires :

  • Hélas !(Poésie)
  • Les Voluptés nocturnes (Romance et poésie).

Né le 28 juin 1980 en Kabylie, il compose ses premiers poèmes dès son jeune âge. Pour lui, la poésie c’est la manipulation des mots, l’agencement de formes pour aboutir à une forme nouvelle toujours inattendue.

Son œuvre, marquée du sceau du pessimisme, se veut une tragédie d’un penseur de la désillusion.

« Hélas ! » :

Recueil de poésie, sorti aux éditions Edilivre – Paris 2019, à travers lequel on découvre beaucoup d’émotions exprimées métaphoriquement et tout un monde de symboles qui s’ouvre au lecteur, et qui sans aucun doute séduira les passionnés de la poésie, et excitera les curiosités par son originalité et sa complexité et dans le langage et dans les concepts traités.

Un texte à caractère poétique, où l’auteur évoque avec emphase et avec un style très travaillé un ressenti face à l’Existence, altérant les poèmes avec des passages plus romancés et ciselés dans un lyrisme exceptionnel et traitent les bouleversements d’une âme, mêlés à chaque fois au goût de la désillusion.

Il est riche et profond par les différents thèmes qui s’y trouvent, à noter : l’amour et le chagrin, la solitude et l’ennui, la folie et la déception … le désespoir, la mort.

Le désespoir est d’ailleurs le premier sentiment qui nous vient à l’esprit en entamant votre ouvrage, pourquoi avoir choisi cette catégorie de la poésie ?

Oui, effectivement ; ce livre expose une affirmation liée au non-sens de l’Existence. Donc, il semble être une déclaration de rupture avec l’espoir. Et, il existe une inévitable appréhension, tout aussi désastreuse lorsque « trop tard » substitue à l’éventuel, qui entraine forcément un désespéré à croire, dans toute sa condition, qu’il en a bel et bien fini avec le possible. Et, se considérant responsable de ce qu’il est ; voilà la plus dangereuse attention sur soi qui accélère ses pensées maladives à en faire de lui-même son propre ennemi.

Et pour exprimer ce reniement de l’extérieur, l’écriture pessimiste s’impose. Bien plus que ça, soustrait au positif, que la fécondité des idées noires efficacement s’opère ; rien d’autre.

Écrire pour moi c’est trouver un refuge dont rarement on en parle sérieusement.

Qu’est-ce qui vous a incité et inspiré à écrire ce recueil, à quelle logique et à quel instinct avez-vous obéit en l’écrivant ?

Une grande partie de ce recueil a été écrite dans une période de ma vie qui coïncide avec ma découverte pour l’échec.

Certes, lorsqu’on aperçoit l’échec en soi-même s’entrecroiser au présent, le futur ferait totalement figure du déjà-vu. Il en va de même pour le raté : ni l’effort ni le temps ne changeront rien à la catastrophe de sa vie ; et tant qu’il a atterri dans l’absence de réussite, la sensation du vide existentiel, cette hantise qui tarit la vie, le gagne à un tel point de le séparer de l’extérieur et de le laisser sombrer seul dans les profondeurs cachées de son être.

J’ai donc commencé à écrire ce livre pour échapper à la routine du rien faire et toute cette négation extrême qui en découle reste un état compatible à mes humeurs. Sans doute, l’intérêt pour la poésie est lié, avant tout, à cette magie des mots qui veulent tout dire et à l’expression qu’invente la nécessité d’épuiser son mal intérieur, ou du moins soulager l’âme d’un supplice.

Il est vrai que les poèmes ici relatent une pensée destructrice, plus au moins, contenue ; et traduisent tant bien que mal un délire existentiel, tout à fait impossible à négliger. Ce qui fait qu’au fur et à mesure que le lecteur parcoure ces pages, il se heurte systématiquement à la question de l’Existence face à laquelle l’être se dresse en « vaincu ». Mais, le livre en lui-même se veut une versification du désarroi, c’est-à-dire une représentation poétique de l’évolution dans le néant, rien de plus. Un livre où l’on peut comprendre, en toute évidence, que l’être subi la vie.

D’où l’auteur puise-t-il toute cette haine qu’il s’inflige à l’esprit et qu’il ressent envers autrui ?

Il n’est pas toujours nécessaire d’aller loin pour chercher la haine… Elle est en chacun de nous, à l’affut de son objet.

Ici exprimée, peut-être est-ce juste une colère contre un idéal loupé ! Mais, à force d’y penser et de retourner cela dans l’esprit, on finit par comprendre qu’une telle colère s’avère dangereuse. Car, on s’en prend tout bêtement au fictif et sans doute exercer une influence sur l’inexistant se révèle de l’impossible. C’est exactement ces agitations nulles et inutiles qui réveillent cette haine en nous… cette passion qui fait qu’on se retourne vite sur nous-mêmes pour tenter d’assouvir ce désir de tout anéantir.

C’est en effet à un déchirement que ma plume obéit pour aborder dans mes textes cette haine que porte l’être en lui et qui le ronge en continu.

Une volonté de peindre le tragique, parfois excessive jusqu’au malaise, détermine mon style et définit la trajectoire de ma plume dans l’univers des mots.

Est-ce que ces poèmes reflètent le récit de la vie de l’auteur, ou bien il ne s’agit que du ressenti d’une certaine mélancolie ?

Oui, toute cette poésie qui évoque surtout le vertige du tourment constitue des instants précis de ma vie…des états d’âme et des ressentis. J’ai toujours cru à cette puissance des mots qui rivalisent, tant bien que mal, avec la mélancolie. Sans cela, peut-être, je ne me serais pas jeté dans l’univers des mots. Quand on est en désaccord avec soi, on est censé de penser contre soi… J’avais donc la pensée tout le temps rivée sur moi et contre moi. Ainsi toute expression cache une mystérieuse confidence. Et, ce qu’il y a de mystérieux dans l’écriture, c’est que même si on dit tout, il y a toujours quelque chose à ajouter.

Le meilleur récit de vie, c’est là où le « Moi » est principalement le propre ennemi de l’auteur.

A qui vous adressez-vous et quel message voulez-vous transmettre à travers cet ouvrage ?

Ce livre s’adresse aux passionnés de la poésie et aux amoureux des mots. Il contient le malheur d’évoluer dans la confusion, c’est-à-dire ces dangereuses métamorphoses qui ne s’adaptent aucunement au réel. Il aborde la question d’être sans connexion avec le vrai, avec l’essence même de l’Existant.

A peine nous apercevons dans vos poèmes une lueur d’espoir que l’on retombe facilement dans le désarroi et le malheur, l’auteur saute d’une humeur à son opposé, expliquez-nous cela…

Au milieu de tout déséquilibre, personne n’y arrive, tout compte fait, à trouver solution à l’impasse ni faille au sort malheureux. Grevé, On se soumit aux exigences de la contradiction… on se soumit aussi à ce hasard sans révélations… Obligation de la vie ou une nécessité d’exister gorgée de doutes et de rejets, d’ennuis et de confusions, qui prend tout de suite la forme du désarroi. Et le désarroi accroît le négatif et élève en continu la pensée d’inapte à l’illusion.

Nous retrouvons dans votre livre quelques poèmes qui laissent entrevoir une lueur d’espoir dans la vie de l’auteur, comme « Sagesse », « La lune, ce soir », « Heureux si… » et « Rêves ». Expliquez-nous cet état d’esprit…

Quand tout se déchire, se décompose et subit, aussi complexe, l’épreuve de l’incohérence et du reniement, chaque chose perd à son tour le sens, se détériore affreusement et rapidement et cesse d’être.

Il convient en effet de penser à la dégression dans le temps, cette dimension non restreinte où tout s’y perd… illusions, certitudes, tout se remplace par le vide ; un vide où le négatif s’y accroît à la taille de l’univers.

Dans ces conditions de longues tergiversations, la force d’affirmation dépérit et le néant se traduit par l’unique issue évidente, une voie de libération de ce vouloir sortir de soi.

Ainsi tout se mélange et se combine, et tout apparait autre. Et de l’âme, confrontée à l’insignifiance, naissent toutes les contradictions.

Vous décrivez la nature comme un refuge, comme un jardin secret, que vous évoque la nature ? Est-ce seulement pour la rime et pour l’esthétique que vous décrivez les paysages et les merveilles de l’univers ?

Le poète est lié à la nature d’une façon très étroite. Donc loin d’être insensible à sa fascination et sa splendeur ou même parfois à cette harmonie entre l’intérieur (âme) et l’extérieur (paysage), une évidente communion, le poète excelle dans ce concept comme dans celui de l’imagination, le symbole, le mythe…etc.

Et abordée ici-même non seulement comme refuge, mais jamais pour la rime et l’esthétique, pour être clair, … C’est vrai qu’elle est décrite dans son important rôle d’apaiser l’âme et de la soustraire au vide, mais elle est aussi évoquée pour ses beautés et ses symboles, ses mystères et ses révélations.

Quels sont vos projets, des ouvrages en cours ?

  • Les mots dits (Récit de vie)
  • Elle (Roman)
  • Réflexions & sentences
  • Pécaïre !… (Poésie)
  • Les Mots interdits (Récit de vie)
  • Whisky’swords (Poem)

Entretien réalisé par Hamid Si Ahmed

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