Mikaël est un auteur et illustrateur franco-canadien qui a développé au fil des ans une grande sensibilité autour de la condition humaine et une grande curiosité pour les lieux communs comme on peut le découvrir dans la trilogie Promise qu’il a publié aux Éditions Glénat entre 2013 et 2015.

Depuis 2017, l’auteur a entamé une série de trois diptyques où les récits se déroulent dans la ville de New York à l’époque de la prohibition. En effet, après Giant et Bootblack, Mikaël complète sa série avec Harlem[1], une œuvre qu’il consacre à Stéphanie St. Clair que l’on surnommait à l’époque Queenie. Madame Queen est née en Martinique en 1897 et elle est décédée aux États-Unis en 1969.

À l’instar de Charlie Lucky Luciano, Stéphanie St. Clair dirigeait de nombreuses activités criminelles à Harlem. Elle était redoutée par ses ennemis et elle était populaire auprès des moins nantis, car elle était impliquée pour informer la communauté noire sur ses libertés civiles. Elle était aussi réputée pour avoir dénoncé la discrimination, la brutalité policière ainsi que les perquisitions illégales contre les noirs. Durant les années 1930, la marraine de Harlem a vécu au cœur du Harlem Renaissance et a connu l’effervescence autour de ce mouvement qui a contribué à éveiller les consciences.

Ce bref résumé de la vie de Stéphanie St. Clair, qui est bien illustré dans Harlem, permet de saisir toute la complexité de la personnalité de cette femme qui a inspiré le diptyque de Mikaël.

En effet, si le premier volet permettait de découvrir Madame Queen, son entourage, ses alliés et ses ennemis, le second nous permet de prendre conscience de la violence dans laquelle baignait Queenie pour conserver son royaume en proie à toutes les convoitises. Dans ce contexte historique et social, elle devait faire preuve de courage à une époque qui était dominée par les hommes.

Se faisant, Mikaël évoque d’abord la rivalité qu’elle avait avec le mafieux Dutch Schultz, qui était réputé pour ses liens avec la Yiddish Connexion. Il n’omet pas de rappeler le double-jeu de son homme de main Ellsworth Raymond « Bumpy » Johnson qui s’associa avec Lucky Luciano pour protéger les intérêts de la mafia dans les quartiers noirs de Harlem.

Mikaël fait d’ailleurs un excellent travail de recherche historique et graphique pour nous entrainer dans les années 1930, à travers des lieux, des tenues vestimentaires, des personnages et des formules langagières propres de l’époque. Et pour éviter toute polémique autour du scénario qui se veut authentique, l’éditeur mentionne au début de l’œuvre, que cette fiction à caractère historique restitue un vocabulaire que les protagonistes utilisaient à l’époque. Avec Harlem, Mikaël nous fait découvrir non-seulement un récit puissant, mais en plus, des personnages aussi vrais que nature.

Réda Benkoula

[1] Harlem – Tome 2 | Mikaël (Scénario, Dessin, Couleurs) | Dargaud | 2023 | 64 pages

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